jeudi 8 octobre 2009

Pique-nique à Hanging Rock, ou la chance de découvrir des classiques sur grand écran

Malgré la frénésie incessante des nouveautés sortant en salles chaque mercredi, il est bon parfois de se faufiler dans un cinéma pour voir (ou revoir) un classique (en copie restaurée c’est encore mieux !). Les cinéphiles parisiens oublient parfois un peu vite le vivier de films plus ou moins anciens qui est à notre disposition dans la capitale. Malgré l’inévitable gourmandise de films récents, parfaire sa cinéphilie par le passé est un régal.

J’intercale donc (plus ou moins) régulièrement ces séances de rattrapage de films que je n’ai jamais vus. Le dernier en date était le remarquable A bout de course de Sidney Lumet, et mardi soir, j’ai jeté mon dévolu sur Pique-nique à Hanging Rock, l’un des premiers films du cinéaste australien Peter Weir. Ce dernier, qui depuis 25 ans réalise des films américains, a eu une belle carrière avant son exil hollywoodien pour Witness au milieu des années 80. Pique-nique à Hanging Rock est son deuxième long-métrage, réalisé en 1975 après Les voitures qui ont mangé Paris l’année précédente. La dernière vague, Gallipoli et L’année de tous les dangers finiront de l’assoir comme un cinéaste australien majeur.

Pique-nique à Hanging Rock est ressorti cet été en France en copie restaurée. A l’affiche du Grand Action dans le Quartier Latin depuis près de deux mois, mardi soir était la projection de la dernière chance. Si la filmographie américaine de Weir, de Witness à Master & Commander, n’a aucun secret pour moi, mes lacunes sont énormes sur sa période australienne, n’ayant vu que L’année de tous les dangers avant ce Pique-nique.

Pique-nique à Hanging Rock a pour cadre un collège pour fille huppé dans l’Australie campagnarde de 1900. Nous sommes à la Saint-Valentin, et une sortie au fameux Hanging Rock, une montagne de la région, est organisée pour les élèves. Au cours de cet après-midi qui s’annonçait idyllique, trois jeunes filles et un professeur disparaissent sans laisser de trace. Un accident s’est-il produit ? Ont-elles été enlevées ? Tuées ? La police locale et les témoins semblent bien incapables de résoudre le mystère…

Il y a peu l’Étrange Festival m’a permis de voir sur grand écran The Proposition de John Hillcoat. Si à l’époque j’avais déjà vu Pique-nique à Hanging Rock, nul doute que l’envie de rapprocher les deux films me serait venue. Certes le film d’Hillcoat est un western ultra sanglant dans le désert australien, alors que le film de Weir se déroule dans une ambiance plus feutrée, chic et verdoyante et a pour héroïnes des adolescentes virginales.

Mais on trouve dans les deux films ce portrait d’une Australie naissante, tiraillée entre l’ancien et le nouveau monde. On trouve surtout dans Pique-nique à Hanging Rock l’œil de Peter Weir qui est celui d’un naturaliste, aimant à poser ses personnages et sa caméra dans un environnement à peine touché par l’homme. C’est un trait du cinéaste que l’on retrouve régulièrement dans sa filmographie, même hollywoodienne, comme en témoigne Witness (plongée chez les Amish proches de la nature), Mosquito Coast (un père de famille installe sa famille dans la jungle) ou plus récemment Master & Commander dont l’un des deux personnages principaux est un naturaliste. The Proposition de John Hillcoat se place dans le même élan de films se souciant autant de l’environnement que de l’intrigue.

Cet amour de la nature se perçoit pleinement dans Pique-nique à Hanging Rock, photographie chatoyante et flûte de pan à l’appui. Mais plus que cela, c’est le soin de Peter Weir dans ses cadrages, dans le choix de ce qui passe sous l’œil de sa caméra qui confère au film cet aura aérienne. Comme si Peter Weir était le cousin australien du texan Terrence Malick, qui dans la même décennie réalisait La balade sauvage et Les moissons du ciel. D’ailleurs ces dernières années, Weir se fait presque aussi rare que Malick, n’ayant réalisé que deux films ces quinze dernière années (mais rassurons-nous, un nouveau est en boîte et sortira en 2010).

Malgré la splendeur visuelle et atmosphérique de Pique-nique à Hanging Rock… je me dois d’avouer m’être tout de même un tantinet ennuyé (ce qui ne m’arrive jamais devant un film de Malick…). Mais le désir de Weir de maintenir le mystère autour de son intrigue, de nous laisser dans le flou jusqu’au bout et au-delà, est remarquable.

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