jeudi 12 novembre 2009

La Corée fait la sourde oreille et court en tous sens

Le Festival Franco-Coréen du Film entame sa deuxième semaine à l’Action Christine. Si les années précédentes, les séances s’étalaient toute la journée pendant une semaine seulement, la 4ème édition fait sa petite révolution en concentrant les projections en fin de journée et en doublant la durée de la manifestation. On ne s’en plaint pas, il est ainsi bien plus facile d’en profiter…

Mercredi j’ai donc entamé cette nouvelle semaine par un long-métrage de fiction de la sélection officielle, suivi de l’un des programmes de courts-métrages coréens.
Je suis allé voir le long, intitulé A.U.D.I.T.I.O.N., après avoir lu et entendu des avis peu emballés. J’en suis ressorti assez agréablement surpris. Le film, réalisé par le duo Kim Seong-Jun et Lee Je-Cheol, narre la rencontre entre Hyun-Ji et Won Joon. Elle est malentendante et vit seule avec son père depuis la mort de sa mère. Il danse dans un groupe de B-Boys qui rêve de percer grâce à une audition importante, et se trouve fasciné par le langage des signes grâce auquel Hyun-Ji communique.

Ce qui séduit dans A.U.D.I.T.I.O.N., c’est sa recherche de simplicité. Certes le film n’exploite pas le fonds social d’un tel sujet, que ce soit ces jeunes qui rêvent de musique ou ces pères élevant seuls leur enfant. Il y avait bien sûr matière à plus approfondir le contexte. Mais du coup, les réalisateurs brossent ces deux jeunes gens avec touché, lui fort en gueule et cachant son bon fond, elle curieuse mais craintive du monde extérieur.

Ce qui séduit c’est cet aspect humain assez universel qui parvient longtemps à éviter l’écueil du mélo. Malheureusement il n’y parvient pas tout du long, et se jette trop facilement dedans dans le dernier acte. C’est un trait récurrent du cinéma coréen que de parfois verser trop facilement dans la recherche facile de l’émotion, on peut donc pardonner au film ce défaut dont il ne s’exempt pas. D’autant que le regard posé sur les rapports humains d’une personne sourde et muette (particulièrement en Corée du Sud) n’est pas inintéressante, ces coups d’œil en biais, cette méfiance, cette mise à l’écart assez naturelle.

Après une pause au cours de laquelle j’ai vraiment eu l’impression qu’effectivement, mon opinion sur A.U.D.I.T.I.O.N. est loin d’être majoritaire, retour en salle pour une sélection de court-métrages (la sélection numéro 1) dans l’ensemble d’assez bonne tenue. Les deux meilleurs s’intitulent Stop et Hybrid.

Stop, un film d’animation très court (6 minutes), se déroule en voiture, sur un pont. Un homme conduit sa mère, lorsqu’un camion roulant sur la mauvaise file entraîne un accident au cours duquel tout à coup, le temps s’arrête autour de l’homme conduisant sa mère. C’est cette montre à son poignée. Elle s’est déréglée, et dès qu’il pose la main dessus, il évolue dans un monde en mode pause. Cela tombe bien car sa mère et la voiture sont en train de basculer dans le vide.
La qualité première de Stop est d’être drôle et ludique. Le trait est basique et en noir et blanc, mais le personnage y est croqué avec une bonhomie communicative.

L’autre excellent court de ce programme s’intitule Hybrid. Un français y semble un peu égaré en pleine campagne coréenne. Faisant du stop, il est pris par un étrange camionneur peu bavard et passant son temps à se désaltérer et pisser dans des bouteilles en plastique. Visuellement soigné, Hybrid convainc par son ton totalement décalé et d’un rocambolesque sobre. Le seul personnage qui parle, c’est le français, en français, pour lui-même puisque l’autre ne comprend pas et ne répond pas. Ce qui donne au court un côté presque burlesque, surtout lorsque l’on découvre l’utilisation qui est faite de l’urine du camionneur. En 15 minutes, le réalisateur créé un mini univers qui fonctionne et qui séduit.

Les trois autres courts sont un ton en dessous. Fish, qui ouvrait le bal, se montre le plus long et ambitieux sur le papier, en mettant en parallèle le travail d’une lycéenne dans un PC bang et la découverte d’un cadavre dans une petite rivière à l’extérieur de la ville. L’idée était intéressante, mais on comprend si vite que le cadavre retrouvé est celui de notre lycéenne que l’on se demande où veut en venir le réalisateur en 30 minutes. Car il n’en vient pas à la résolution de l’énigme « comment finit-elle dans la rivière, et par l’impulsion de qui ? ». Cette énigme reste totale. Le film aurait été beaucoup plus intéressant si le cinéaste s’était concentré sur la partie de la découverte du corps par ce vieux pêcheur et pris en charge par ces deux flics attendant des collègues qui n’arrivent pas. Dommage.

Le programme réservait également deux petits films « choc ». Cold blood voit un automobiliste se livrer à une vraie petite guerre avec une jeune cycliste ayant failli causer un accident. Intéressant au premier abord, le film lasse assez vite, se révélant une course poursuite sans réelle finalité, puisque lorsque l’on croit que le film va être une métaphore de la violence de la société et des difficiles rapports intergénérationnels, il tourne en eau de boudin, flanchant au dernier moment dans une conclusion mollassonne. Mais après tout, peut-être cela fait-il partie de la métaphore…

Le dernier court-métrage projeté fut Too bitter to love, commençant avec légèreté et pudeur, montrant un couple de lycéens se retrouvant en secret pour faire l’amour pour la première fois. Le film change de ton et devient dérangeant lorsque le garçon s’absentant faire une course, la fille est violée par un voisin débarquant sans prévenir. Le film met mal à l’aise sans pour autant provoquer la réflexion.

A noter que le programme de court-métrages a attiré plus de spectateurs que la plupart des autres séances du festival jusqu’ici. Serait-ce donc à chaque fois qu’un membre de l’équipe du film est invité, puisqu’ici le comédien français de Hybrid (et également compositeur du film) Christophe Ruggi était présent, comme avant lui Lee Myeong Se et Yang Ik-June ? Ou les parisiens s’intéressent-ils simplement de plus en plus au cinéma coréen ?

4 commentaires:

Pierre a dit…

Oui en effet tu es bien seul sur audition ^^.
par contre j'ai trouvé que celui de ce soir était un petit bijou, surtout ne le loupe pas, je sens que je vais le choisir comme meilleur film ^^.

Dooliblog a dit…

Bon bah on est 2 pour Audition :)
Malgré une petite tendance au mélo sur la fin, le film n'est jamais lourd, je l'ai trouvé très agréable et attachant.

(quel rythme de publication, je suis admiratif ;)

I.D. a dit…

Audition... et tu es sérieux, là ? :) Les scènes poussives du père qui ne servent à rien, le jeu des acteurs pas terrible, une réalisation ma foi... que dire ? Bref, passons.
Sinon, hier avec du recule, j'aime assez le cm Too bitter to love. Après, il est clair que Stop et Hybrid sortent du lot.

David Tredler a dit…

@ Pierre : J'ai hâte de le voir alors, ça sera pour dimanche soir avec les filles...
@ Dooliblog : Aaah, merci je ne suis pas seul à avoir apprécier Audition ! (le rythme de publication me coûte en sommeil...^^)
@I.D. : Je savais que sur Audition on était pas sur la même longueur d'onde ;)

over-blog.com