lundi 16 novembre 2009

Quand les résistants à l’invasion communiste succèdent aux caïds de campagne, c'est toujours le Festival Franco-Coréen du Film

A l’approche de la fin du Festival Franco-Coréen du Film (snif), le désir d’en profiter au maximum ne s’éteint pas. Dimanche donc, malgré la fatigue, le programme s’est dédoublé, enchaînant l’avant dernier film de la sélection officielle avec un vieux film de propagande d’Im Kwon-Taek. Une programmation pour le moins variée et agréable.

Les jours qui ont suivi sa première projection mercredi dernier, Potato Symphony fut accompagné d’une réputation flatteuse lui allant plutôt bien. Prenant pour cadre une petite ville de province, le réalisateur Jeon Taek s’y attache à un groupe d’amis approchant de la quarantaine. Semblant tous mécontents de la façon dont leur vie a tourné après les années lycée, ils voient d’un œil ravi le retour en ville après des années de disparition de Baek, l’ancien chef de leur bande. Dans leur jeunesse, ils s’étaient ensemble frottés à Jin-Han et sa clique, qui les avait battus et a depuis pris le contrôle de la ville comme un caïd. Avec le retour de Baek, les amis entrevoient la possibilité de corriger les injustices du passé.

Amitiés masculines, vieilles rancœurs, gangs rivaux, les thématiques abordées par Potato Symphony ne sont pas étrangères à certaines obsessions du cinéma asiatique, pour ne pas dire coréen. Mais en fait de déjà vu, on trouve dans le film de Jeon Taek un je-ne-sais-quoi de séduisant qui parvient à le hisser au-dessus du tout va. Moins que les personnages, c’est le cadre dans lequel ils s’inscrivent qui fait la force de Potato Symphony.

Ce cadre c’est celui d’une Corée du Sud provinciale, campagnarde, vivant au ralenti, à moitié figée dans un passé qu’elle ne parvient pas à dépasser. Tout le petit monde dépeint vit selon une hiérarchisation de sa société établie quelques années plus tôt et dans laquelle il semble empêtré. Le pouvoir montré dans le film, la vision de la « mafia », est loin de cette organisation huilée qui peut être si souvent traitée sur grand écran.

Il en découle des personnages, au choix losers ou petits maîtres manquant vite d’envergure, formant une combinaison qui étonne. Du coup le film a beau souffrir de longueurs et d’embrouilles scénaristiques, il laisse une impression séduisante qui tient dans ce regard intéressant sur une certaine Corée bloquée dans le passé.

L’enchaînement avec Testimony de Im Kwon-Taek n’en est que plus amusant. L’un des quatre films de propagande datant de la dictature de l’ère Park Chung-Hee (en l’occurrence ici 1973), le long-métrage aborde le conflit coréen, et plus particulièrement, en 1950, l’invasion de Seoul par les Nord-Coréens. Le film s’attache tout particulièrement à Soon-ha, la fiancée d’un officier de l’armée Sud-Coréenne, qui cherche désespérément à fuir la capitale pour rejoindre Daegu, en province.

Après Six Daughters qui cherchait à vanter à tout prix les vertus de l’industrie et des valeurs sud-coréennes dans l’après-guerre, Testimony s’atèle lui à se poser en brûlot anti-communiste. Il ne fait pas bon être fervent défenseur du régime nord-coréen et de l’endoctrinement communiste devant la caméra d’Im Kwon-Taek, face à la bravoure et au sens du sacrifice de l’armée sud-coréenne.

Comme d’habitude pour ce genre de film, le recul venant avec les années transforme souvent un tel discours en farce comique, accentuée par un jeu très (trop) appuyé des comédien, desservis par des dialogues spécifiquement écrits pour abonder dans le sens du discours général (et déclenchant facilement les rires eux aussi, demandez à l’amie coréenne qui m’accompagnait au film).

Pourtant Testimony a la qualité incontestable d’être réalisé par le grand maître du cinéma sud-coréen, qui malgré la propagande ne se départit pas de sa capacité à manier la caméra, offrant au passage de beaux moments de mise en scène dans ce film de guerre daté. Ca valait le coup de rester tard au Festival.

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