Nous sommes moins de dix dans la plus petite salle de
cinéma de Paris. La salle 7 de l’UGC Orient-Express. J’ai beau me dire que
j’aurai un pincement au cœur lorsque le complexe du dernier sous-sol des Halles
fermera, c’est une pointe de déception, voire d’agacement, qui m’assaille
lorsque je découvre que le film que j’ai choisi est projeté dans cette
minuscule salle. Et malheureusement, lorsqu’un tel choix s’opère, c’est qu’il
n’y a plus vraiment de choix possible.
Si l’on m’avait dit il y a un mois à peine que, douze
jours après sa sortie, c’est dans cette fameuse salle 7 que je verrais Captive de Brillante Mendoza, j’aurais
eu du mal à le croire, probablement. Le cinéaste philippin est passé par la
compétition berlinoise avec ce film, et chacune de ses précédentes œuvres a eu
suffisamment d’impact auprès de la critique française et des cinéphiles pour
faire de sa première coproduction hexagonale, avec Isabelle Huppert en tête d’affiche, un évènement cinématographique
attendu par les amateurs de 7ème Art. D’autant qu’après un rythme de
réalisation frénétique il y a trois/quatre ans, Mendoza s’est fait amplement
attendre depuis son dernier long-métrage sorti en salles, Lola (depuis, il s’est tout de même rattrapé, puisqu’un nouveau
film était en compétition à Venise il y a quelques semaines à peine…).
Mais les critiques ne furent pas aussi enthousiastes que
pour ses précédents films, et malgré l’affichage conséquent dans les couloirs
du métro parisien, malgré Isabelle Huppert, les chiffres de Captive au box-office français en
première semaine furent proches de l’anémie. Bien sûr, une sortie en salles en
septembre, mois d’ordinaire peu porteur (le moins porteur de tous en vérité) –
et cette année en particulier – n’a rien arrangé aux affaires. En seconde
semaine, le film de Brillante Mendoza était déjà relégué à l’arrière-boutique
des cinémas parisiens. A savoir des séances presque inexistantes en semaine, d’autres
très ponctuelles le weekend, dans une toute petite poignée de salles. Le seul
cinéma offrant un peu de souplesse ? Cette fameuse salle 7 de
l’Orient-Express que je cherche en général à éviter et où je n’ai finalement eu d’autre choix que
de m’aventurer, par crainte de le rater définitivement si je laissais passer
deux jours de plus.
Elle est surprenante cette salle 7. Lorsque l’on tire la
porte pour y entrer, on trouve six rangées de fauteuils faisant face à un écran
qui pourrait presque paraître grand pour une si petite salle. Mais ce n’est
qu’un leurre car lorsque la lumière s’éteint, on se rend vite compte que seule
une portion de l’écran est exploitée pour la projection, un gros tiers, et que
ce voile blanc qui paraissait presque grand à la lumière se révèle pathétiquement
petit dans l’obscurité. Un home-cinéma plus qu’un grand écran en vérité. C’est
bien là la salle de la dernière chance où viennent se cacher les longs-métrages
en fin d’exploitation (ou à tout petit potentiel). C’est là que se cachait donc
Captive moins de deux semaines après
sa sortie.
L’avoir découvert dans ces conditions en a probablement
altéré la saveur, et certainement l’impact. Peut-être me serais-je trouvé happé
avec une plus grande force par le récit de cette prise d’otages dans la jungle
philippine, sans ce bout d’écran. Peut-être n’aurais-je pas trouvé ce retour
attendu de Brillante Mendoza être un film moindre dans sa passionnante
filmographie, avec cette Huppert tantôt forcée, tantôt admirable. Mais jamais l’ennui
n’est entré en jeu pendant cette odyssée humaine de plus de deux heures. Et
puis je pensais à ces amis qui au moment même où je découvrais Captive étaient eux en voyage aux
Philippines (et avaient osé aller voir le film de Mendoza juste avant de partir !).
Quelque part dans cette salle des sous-sols parisiens, j’étais presque avec
eux, tendant le visage vers mon bout d’écran. Eux vivaient l’aventure pour de
vrai. Encore mieux que sur un (vrai) grand écran.
2 commentaires:
Vivants ! ^^ Nous sommes revenus d'un voyage splendide tout en ayant évité de nous rendre dans l'île de Mindanao (on va attendre que les choses se calment enfin si un jour les tensions cessent). Sinon pas d'Abu Sayyaf à Puerto Princesa, juste le soleil, les plages et une superbe rivière souterraine. En bref, parlons cinéma. :)
Nous regrettons d'apprendre que le film de Brillante Mendoza ait rencontré si peu d'enthousiasme de la part du public. Nous imaginions également un autre sort surtout avec Isabelle Huppert en tête d'affiche. Quant à tes conditions de visionnage, il est vrai que cette salle ne rend pas honneur aux films qu'elle projette.
De notre côté, nous avons apprécié "Captive", sans doute l'effet du voyage qui approchait qui nous le rendait plus vivant. Qui sait ? Ce n'est pas son meilleur film loin de là mais il a en lui des choses très fortes qui marquent à l'image de chacune des œuvres du cinéaste pinoy.
Aaaaah ! Voilà une bonne nouvelle ! Je t'avoue qu'effectivement en découvrant le film de Brillante Mendoza, je me souvenais qu'avant de partir tu m'avais dit que vous alliez passer par l'île où se déroule le film, et en voyant Captive, je me disais "Et dire qu'ID et Diana sont là-bas !!" ;)
Oui c'est triste pour le film, 3 semaines après sa sortie, il était quasi invisible sur Paris.
Espérons que le prochain Mendoza s'en sortira mieux !!
Bon retour parmi nous en tout cas ;)
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