Avec l’avènement apparent de la 3D dans les mœurs
cinématographiques, l’idée a commencé à trotter dans la tête de certains de
faire profiter de cette technique certaines de leurs œuvres passées par une conversion tardive. Est-ce une
simple opportunité économique, un désir de faire découvrir certains
« classiques » à une nouvelle génération ou une réelle envie
artistique de pousser un film plus loin dans son esthétique et les sensations
qu’il procure ? L’aspect économique, et la possibilité de faire des
entrées avec un titre qui a fait ses preuves, est indéniable, surtout lorsque
l’on constate que c’est le studio aux grandes oreilles qui s’est emparé
avec le plus d’assiduité de cette vague de ressorties en 3D. « Le Roi
Lion » et « La Belle et la Bête » y sont déjà passé (même si
seul le premier est sorti en salles en France pour l’instant), et dans les mois
à venir ce seront « Le Monde de Nemo » et « Monstres &
Cie » qui seront du lifting.
Le cas de James Cameron diffère de celui de Disney. Le
cinéaste qui avait dominé le monde avec Titanic en 1998 avait ensuite
disparu de la circulation pour accoucher d’Avatar plus de dix ans plus
tard, offrant au monde la nouvelle génération de la 3D relief pour le meilleur
et pour le pire. Et alors qu’il prépare les suites à sa bataille spatiale écoloprévisible, Cameron a pris le temps de retourner vers son Titanic pour
le convertir à la 3D. Et entre ses mains, cette conversion ressemble moins à
une tentative de gratter un peu plus de fric aux spectateurs qui lui en ont
déjà tellement donné qu’à un technicien s’amusant avec ses instruments et
faisant étale de ce qu’il est possible de faire lorsque l’on s’emploie à bien
utiliser le jouet qu’il a lui-même offert au cinéma. Peut-être parce qu’il a vu
ces films convertis par les studios alors qu’ils n’étaient pas pensés à
l’origine comme des films en 3D, et que ces conversions à la va-vite s’en sont
nettement ressenti dans la qualité graphique des films en question, du
« Choc des Titans » à « Green Hornet ».
Je suis justement allé voir en salles les conversions en 3D
du Roi Lion et de Titanic à deux jours d’intervalle. Pour le
premier, ce fut plus un soudain élan de nostalgie que j’avais ressenti en
janvier dernier au Showeb lorsque j’avais découvert la scène d’ouverture
en 3D au Publicis, une scène qui m’avait procuré d’inattendus frissons et qui
m’avait fortement donné envie de redécouvrir le classique moderne de Disney sur
grand écran. Parce que c’est le dernier Disney de Noël que j’avais vu au Grand Rex en entrant dans
l’adolescence, parce que je l’avais vu et revu en vidéo jusqu’à ce que je me
sente un peu trop vieux pour le faire, et pour en avoir envie. J’aurais aimé le
voir en VO, pour une fois, entendre la voix perfide de Jeremy Irons et celle
rassurante de James Earl Jones, mais je n’ai pas eu le choix, ce fut en VF,
dans une salle remplie de gamin commentant le film, voire vomissant pour une
gamine qui ne semblait même pas avoir 3 ans et qui était assise le rang
derrière moi. Le genre de condition de projection que l’on veut oublier et qui
n’est pas loin de gâcher un film. Je reviendrai bientôt dans un autre billet
sur les enfants au cinéma, la digression serait trop longue ici.
Aller voir Titanic en 3D au cinéma ne relevait en
revanche pas pour moi de la nostalgie. Si j’ai bien vu le film de Cameron au
cinéma en janvier 1998, je ne l’avais jamais revu depuis, et je ne le compte
pas parmi mes grands films cultes, aussi imposant et historique soit-il. Pour
le coup, connaissant la maîtrise de la 3D de Cameron, revoir le film aux 20
millions d’entrées sur grand écran était plus une curiosité cinéphile, car s’il
y a bien quelqu’un capable de sortir une conversion 3D intéressante, c’est
certainement le réalisateur d’Avatar. Mais finalement, lorsque le film
commence, lorsque l’on plonge avec Bill Paxton vers l’épave, lorsque celle-ci
reprend vie, lorsque Leonardo DiCaprio détale dans les coursives ou que Kate
Winslet découvre les merveilleux salons du fameux paquebot, on oublie la 3D, et
un double saut dans le temps nous happe.
Le premier, c’est celui qui nous renvoie malgré tout vers ce
jour de 1998 où le Titanic a repris vie pour la première fois. L’adolescent de
17 ans que j’étais avait coulé avec les passagers dans l’immense salle 1 des
Halles, je m’en souviens encore nettement. Kate Winslet était une jeune actrice
britannique montante, Leonardo DiCaprio était l’idole absolu des jeunes filles
de la Terre entière… Allez voir Titanic, c’était presque comme aller
voir Twilight aujourd’hui, le public féminin s’était approprié le récit
du naufrage pour les beaux yeux de Leo et s’évanouissait à chacune de ses
apparitions.
Mais à le revoir aujourd’hui, il est indéniable qu’aussi
nunuche que peut être le film de Cameron, avec sa scène de sexe pudique dans la
moiteur d’une voiture et avec ses déclarations d’amour trop démonstratives (le
mec est quand même en train de mourir de froid en plein milieu de l’Atlantique
et sait que dans quelques minutes, c’en sera fini de lui, et il a tout de même
le culot de dire « Monter sur ce bateau est la plus belle chose qui me
soit jamais arrivé », faut y aller mollo sur le trémolo les gars…), Titanic
est un rouleau compresseur d’efficacité narrative. Un grand récit épique et
dramatique de plus de trois heures qui nous emporte et ne nous relâche que le
temps de ces brefs instants too much. Rétrospectivement, on ne peut que
constater la brillance du casting, tant Winslet et DiCaprio sont devenus deux
des meilleurs acteurs de leur génération. Il est difficile de ne pas se prendre
au jeu et de ne pas se laisser happer, au cours de cette nouvelle vision sur
grand écran, par ce second saut dans le temps, celui qui nous envoie en
1912 dans l’Atlantique Nord. Revoir Titanic
au cinéma, c’est se perdre entre les époques, celle qui nous est contée,
celle que les sensations du film nous rappellent, et l’instant présent.
Dans cette salle de l’Orient Express où j’ai revu Titanic,
les tremblements de RER et les bruits de tuyauteries faisaient partie du
naufrage, et les lunettes 3D collées sur le nez n’ont fait que renforcer
l’immersion dans les allées du paquebot et la chute vers le fond de l’océan.
Étais-je en 1912, en 1998 ou en 2012 ? Était-ce juste l’effet du retour en
salles devant ce film ou un véritable effet 3D ? Quelle que soit la
réponse, l’expérience valait d’être vécue.
4 commentaires:
Bon, Titanic est mon film préféré, je l'ai vu au moins quinze fois mais le revoir au ciné, c'était comme le voir pour la première fois. La 3D est bien faite mais je trouve toujours cela inutile.
Quant au Roi Lion, comme toi la nostalgie me fait envie mais je n'irais pas. Je préfère me le faire en Blu-Ray.
J'aime beaucoup la comparaison avec Twilight :)
J'ai raté les deux ressorties. Un peu déçu de ne pas m'être bougé, mais voilà... on ne peut pas être partout au même moment.
Je dois encore découvrir "Le roi lion". Ce sera sûrement en 2D et en DVD. Quant à Titanic, je ne lui ai jamais accordé le grand écran qu'il mérite. Je l'aime bien, malgré le côté nunuche que tu décris, et pour les raisons que tu donnes. Je le trouve largement supérieur à Avatar, même si le fait que les deux films soient de James Cameron ne les rend pas vraiment comparables pour autant. Mon Cameron préféré reste Abyss, bientôt chroniqué tu-sais-où.
Merci pour cette chronique, David. On dira ce qu'on voudra, mais ça respire l'amour du cinéma.
@Flow : Revoir son film préféré sur grand écran, c'est magique, je me mets à ta place ;)
@L'accro : Il y a de ça non ? ;)
@Martin : Je ne sais pas trop quel est mon Cameron préféré pour tout te dire. Je n'ai pas vu Abyss depuis trèèèès longtemps. Aliens, c'est presque celui que j'apprécie le moins de la quadrilogie. Je suppose que ce que je préfère de Cameron, c'est ses Terminator. Surtout le premier.
(et merci pour la remarque sur l'amour du cinéma !)
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