C’est la cerise inattendue trônant à la cime du gâteau.
Aller voir un film que l’on attend depuis des mois, bien avant qu’il sorte en
salles, et découvrir à quelques instants du début de la projection que son réalisateur
que l’on admire tant est assis dans la salle, juste devant soi, pour regarder
le film avec nous. C’est ce qui m’est arrivé l’autre soir au Forum des Images
pour la projection de « The We and the I ». Quelques jours après sa
première mondiale au Festival de Cannes 2012, en ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs, le nouveau film de
Michel Gondry était visible à Paris. Et contrairement à la veille où « Touristes » n’avait pas su remplir
la salle 300, le Gondry parvenait sans mal à remplir le grand amphithéâtre du
Forum des Images.
La venue du réalisateur de « Eternal Sunshine of the
Spotless Mind », « L’épine dans le cœur » et « Green Hornet » avait beau ne pas avoir été annoncée, Gondry est suffisamment
aimé des cinéphiles pour attirer une salle entière désireuse de croquer dans
son nouveau film. Ce qui est marrant, c’est que quand le projet « The We
and the I » avait été annoncé, il se murmurait qu’il s’agissait d’un film
de science-fiction. Pendant le tournage du film, beaucoup se demandaient s’il
n’y avait pas quelque chose de plus qui se cachait derrière le principe de base
du film, le voyage en bus d’un groupe de lycéens du Bronx… il a été question à
un moment de voyage dans le temps… Mais non. Gondry n’a pas ajouté d’élément fantastique
à sa virée dans le Bronx. Et si je ne suis jamais contre un peu de fantastique,
Gondry n’a pas eu besoin de cela pour rendre « The We and the I »
passionnant.
Tourné avec des adolescents du coin, le film se déroule
le temps d’une fin d’après-midi à la sortie d’un lycée du Bronx. Le dernier
jour de classe vient de s’achever, c’est l’été, et une trentaine de lycéens
prennent le bus pour rentrer chez eux. Un dernier trajet ensemble avant les
vacances. Un trajet fait de discussions d’ados, de jeux, de blagues, de ragots,
de malaises et de joies, de toutes ces choses qui font l’apparente insouciance
de ce jeune âge. S’il s’agit d’une fiction, les ados jouent presque leurs
propres rôles, et à travers ces gamins du Bronx, c’est le Michel Gondry de
« Block Party » que l’on retrouve, prenant le pouls d’un New York
populaire et d’une jeunesse en verve. Laissant la part belle à la spontanéité,
le film vibre par ses jeunes acteurs et la vie qui se dégage d’eux.
A travers eux, Gondry s’amuse à étudier la place et le
comportement de l’individu dans un
groupe et vis-à-vis d’un groupe. A
mesure que le bus traverse la ville et se vide, le cinéaste français observe le
glissement de certains caractères et brouille les cartes du phénomène des
clans. Au début du film, dans le bus plein, des groupes se forment au sein du
groupe, des liens sont établis, des façons d’être. Et au fil des minutes, au
fil du resserrement du groupe, les personnages s’affinent, les comportements
changent. Le « nous » et le « je ». Le visage que l’on
offre à un groupe n’est pas forcément celui qu’on offre en tête-à-tête.
Ces jeunes sont tellement passionnants à observer que
j’aurais voulu voir le film durer plus longtemps encore, j’aurais pu rester
encore dans ce bus, même lorsqu’il se vide, même lorsque l’excitation laisse
peu à peu place à une amertume certaine, lorsque justement l’insouciance se
gomme ou que les individus sont mis face à eux-mêmes. Michel Gondry est
décidément fort. D’autant que le quasi huis-clos imposé par cette balade
urbaine en bus ne l’empêche pas de faire preuve de cette créativité visuelle
qui est sa marque, grâce à quelques sorties de bus ou flash-backs saillants et
festifs.
A la fin du film, Gondry semblait hésitant, ne sachant
s’il allait être rappelé sur scène peut-être, mais non, la lumière s’est
rallumée, la salle s’est vidée plus vite que le bus du Bronx pendant que lui
restait planté devant son fauteuil. Quelques admirateurs l’ont pris d’assaut
pour lui serrer la main, bien sûr. « The We and the I » ne peut que
renforcer l’admiration des cinéphiles pour le french filmmaker.
8 commentaires:
Je n'avais pas du tout suivie ce projet. Du coup, je le découvre en lisant ton papier. Il m'a l'air super intéressant. Le genre de film qui m'accroche direct par son pitch, par ce qu'il souhaite nous raconter. En plus, si le film est bien mise en scène comme tu sembles le dire et que le casting donne. Alors... je devrais être conquis.
J'aurais pu (dû !) préciser que le film est projeté une seconde fois ce soir (vendredi) au Forum des Images...
Agréable surprise que de voir le réalisateur dans la même salle de cinéma que toi, dis donc !
Je n'avais pas non plus entendu parler du film. Merci donc de l'évoquer ici avant sa sortie en salles. C'est marrant, d'ailleurs, parce que j'ai (ENFIN !) vu "Brazil" de Terry Gilliam l'autre jour et que, devant cet univers complètement fou, j'ai pensé à Michel Gondry.
Cette histoire "normale" me fait assez envie. On verra ça au cinéma. Avec ou sans le réalisateur ;-)
mais c'est marrant, il aime voir et revoir le film qu'il a fait en fait ?
bon j'hésitais entre ce film et postal samedi soir (en présence d'uwe boll également) et puis je me suis dit que le gondry finirait par sortir en salles, contrairement au boll, voué au DTV... ;)
bon, du coup, j'ai très envie de le voir celui là aussi !!
@Martin : tu n'as plus qu'à guetter le film alors !
@Phil : eh bien j'étais dans la même disposition que toi, mon coeur balançait entre Gondry et Boll... et j'ai fait l'autre choix. Tu as sans doute eu raison car les chances de voir Postal sur grand écran sont plus nulles... mais je ne pouvais pas attendre pour voir le Gondry !
Ce garçon est charmant, il n'y a pas d'autre terme. Et modeste. Et son projet, magnifique.
Ça n'a pas l'air mal, j'avoue avoir été déçu de "The green hornet"... mais j'attend avec impatience son adaptation de l'écume des jours! J'ai adorer le livre et je ne vois personne d'autre d'assez fou que pour réaliser cette adaptation!
@Fred, le projet est remarquable oui !
@Géant Blond : Dans Green Hornet, c'est l'ajout de 3D qui m'a déçu, sans la 3D, le film aurait été bien meilleur. C'est vrai que "L'écume des jours" by Gondry, j'ai hâte de voir ça !
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