lundi 12 avril 2010

Julien Doré n'est pas un acteur

Parmi les sorties de la semaine, le film de Pascal Thomas, Ensemble nous allons vivre une très, très grande histoire d’amour… (qui concourra pour le titre le plus long de l’année à coup sûr), m’intriguait. Aucune des critiques ne définissait clairement de quoi le film parle, et pour cause le réalisateur a apparemment spécifiquement demandé aux journalistes de taire le synopsis du film. Mais qu’avait donc bien pu concocter le réalisateur de La dilettante pour qu’une telle confidentialité règne sur son nouveau film ?

Ma curiosité a donc pris le pas sur la méfiance (la récente filmographie de Thomas aurait pourtant pu laisser la méfiance maîtresse de mes sentiments), et je me suis engouffré dans une salle jouant Ensemble nous allons vivre une très, très grande histoire d'amour... Comme cela arrive parfois (assez rarement en y réfléchissant bien), mon aversion pour le film de Pascal Thomas fut immédiate et violente. Non je ne suis pas monté sur mon siège pour hurler au milieu de la salle « C’est nuuuuul ce film » (contrairement à certains devant un autre film), mais franchement, l’envie ne m’en manquait pas.

Comment décrire l’affliction qui fut la mienne pendant la première partie d’Ensemble nous allons vivre une très, très grande histoire d’amour ? C’est bien simple il m’a fallu à peu près 30 secondes (sans exagérer, demandez à l’ami qui m’accompagnait) pour pousser mon premier soupir, à la vue de Christian Morin (oui oui, le clarinettiste de « La roue de la fortune ») commentant un défilé campagnard de danses régionales au milieu d’un champ. Ce fut autant un soupir d’étonnement que de crainte. Les nombreux soupirs qui suivirent celui-ci au cours des 90 minutes suivantes furent divers et variés. De lassitude, d’énervement, d’outrance.

Les deux protagonistes de la grande histoire d’amour décrite par Pascal Thomas sont un beau brin de fille de la campagne et un drôle de gars du sud, qui se rencontrent donc à cette foire paysanne, ont un coup de foudre, et entament quelques mois plus tard une histoire d’amour pour le moins compliquée et iconoclaste. Pendant une quarantaine de minutes, c’est l’amour à la campagne, avec violons romantiques, tripotages au grand air et sentiments contrariés. Un n’importe quoi assez indigeste qui essaie de se démarquer dans l’absurde sans parvenir à trouver le recul nécessaire à faire de ce cinéma de l’absurde une qualité et une capacité à conduire au rire délicieux.

Dans la seconde moitié du film, le récit se déplace à Paris et gagne en second degré et légèreté enfin bienvenue. C’est un peu tard, et cela ne se manifeste malheureusement qu’à travers un personnage, et un acteur, le tailleur sourd et muet délicieusement interprété par Guillaume Gallienne. Ce rival amoureux au p’tit gars du sud est une pépite au milieu du bazar orchestré avec imagination mais sans talent par Pascal Thomas, et apporte une belle réplique surnageant dans ce fade scénario (« Le muet était polyglotte ! »).

Ce qui me fait revenir au titre de ce billet désappointé. Julien Doré n’est pas un acteur. Cette nouvelle star, récente coqueluche du showbiz français pour l’univers décalé qu’il a apporté à la scène française, se lance donc dans le cinéma par la grande porte, avec un premier rôle romantique. Julien Doré n’est pas un acteur. Cet avis n’est pas un mal en soi, car le cinéma a vu à de nombreuses reprises débarquer des garçons et des filles sans véritable expérience devant la caméra et briller malgré cela de mille feux. Des garçons et des filles chez qui le jeu est inné, des garçons et des filles dégageant dès leur début une présence palliant l’inexpérience.

Julien Doré n’est pas de ceux-là. Pas dans ce rôle-là en tout cas. Pas dans ce film-là. Dans Ensemble nous allons vivre une très, très grande histoire d’amour…, Julien Doré trimballe ses cheveux frisés et son accent du sud sans séduire, sans faire rire, sans émouvoir. Il fait le boulot, mais ne fait pas naître d’étincelle. Parfois il irrite, jouant de son accent comme le comique marseillais Titoff (dans ces moments-là, les soupirs se sont enchaînés).

Apparemment certains, d’après ce que j’ai lu ici et là dans la presse, ont apprécié la performance de Doré. Mouais. Je pense que le chanteur n’est pas aidé dans ce film par des dialogues trop ouvertement niais, sans que cela explique toute ma désespérance devant le spectacle de son interprétation. Ensemble nous allons vivre une très, très grande histoire d’amour est un drôle de film, mais n’est certainement pas un film drôle comme il voudrait l’être. Julien Doré est un drôle d’acteur, mais il n’est ni un acteur drôle, ni un acteur, tout simplement. Qui plus est sa présence en tête d’affiche d’un film de Pascal Thomas doit (ou devrait ?) faire grincer pas mal de dents parmi les acteurs de 25 / 30 ans qui tournent depuis un bout de temps avec talent sans accéder encore aux premiers rôles, et voient la performance sans intérêt d’un mec propulsé ici après avoir fait une émission télé et un album. Il y a de quoi se poser des questions.

4 commentaires:

L.M. a dit…

Il n'est pas un acteur, mais est-il seulement un chanteur ?

I.D. a dit…

C'est embêtant tout de même. Doré n'est pas le premier à jouir d'une popularité qui lui permet de faire du cinéma, je pense tout aussi récemment à l'ancienne miss météo de Canal +. Et comme à chaque fois, je pense toujours à ceux qui rêvent de cinéma, de jouer, qui dédient leur vie au jeu pour finalement galérer la pluplart du temps en faisant des petits jobs d'appoint pour survivre. Ce doit être frustrant. J'aimerai les entendre plus ces gens-là pour voir ce qu'ils en pensent.

Enfin, on n'en est pas encore à au niveau des Etats-Unie ou bien à Hong-Kong. Là-bas, la double, triple casquette est de rigueur. J'imagine les Lorie, Alizée et les "étoiles" de la télé réalité se faire une place dans le 7ème art, j'en ai froid dans le dos.

David Tredler a dit…

L.M., je ne m'avancerai pas à répondre à cette question dans la mesure où je ne me suis jamais intéressé à la Nouvelle Star, et où la seule fois où je l'ai entendu chanter, c'était lorsqu'une publicité pour son album passait au cinéma...

I.D., on est sur la même longueur d'onde. La Bourgoin actrice, j'ai du mal à m'y faire aussi, on va voir ce qu'elle donne en Adèle Blanc Sec. Des Alizée ou Lorie au ciné, ça me crèverait le coeur !

Into the Screen a dit…

C'est exactement la réflexion que je me suis faite hier soir par rapport à Louise Bourgoin (en promo pour Adèle sur France 2), qui n'a pas non plus une formation d'actrice... Après ces personnalités ont peut-être un don inné pour le 7e art, mais... on ne peut s'empêcher de douter. Pour ce film, la bande-annonce m'avait déjà rebuté (et où les soupirs étaient déjà là...) je vais donc passer mon chemin.

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