dimanche 27 février 2011

Trois inédits coréens au printemps... en DVD

Je n’ai rien contre les DVD, mais bon, les films pour moi c’est au cinéma qu’ils se regardent et s’apprécient le mieux. Lorsque je veux voir un film, c’est au cinéma et pas sur mon écran de télé (les vieux films, c’est pareil). Du coup ça me fait toujours un peu de peine lorsque je constate que des films que j’aurais bien vus sur grand écran sortent directement en DVD. Malheureusement lorsqu’il s’agit de cinéma coréen, les opportunités de voir les films sur grand écran sont assez rares, les films ne voyageant pas tant que ça jusqu’aux salles parisiennes.

Les films d’auteurs sont les mieux représentés, par le biais des festivals et de la curiosité cinéphile, mais les films à vocation plus populaires se font extrêmement rares. Lorsqu’on jette un œil sur les films coréens sortis au cinéma ces derniers mois, le vide est immense. Une poignée d’habitués ont les honneurs des salles, comme Park Chan-Wook, Hong Sang-Soo, Kim Ki-Duk, Im Sang-Soo, Lee Chang Dong ou Bong Joon-Ho, et les autres restent pour la plupart invisibles, avec quelques exceptions par-ci par-là (notamment Breathless).

Aucun film coréen n’est encore sorti en 2011, et le calendrier du printemps est déprimant pour tout amateur du genre : seul un film s’apprête à sortir dans les semaines à venir. Manque de bol, en plus, il s’agit d’un film qui a déjà été projeté plusieurs fois à Paris et que j’ai vu l’année dernière à la reprise des films de Cannes au Reflet Médicis : Ha Ha Ha de Hong Sang-Soo, qui avait d’ailleurs très justement reçu le Prix Un Certain Regard 2010. Il semblerait, au passage, que le film ne bénéficierait que de 10 copies (d’après Le Film Français) la semaine de sa sortie le 16 mars. Un peu maigre. Après cela, le seul film coréen assurément à l’horizon sera pour juillet, le fameux J’ai rencontré le Diable de Kim Ji-Woon.

C’est donc en DVD que les films coréens seront le plus à l’honneur dans les prochaines semaines. Trois films notables vont ainsi débarquer dans les trois prochains mois dans ce format. Le premier débarque le 15 mars : Woochi, le magicien des temps modernes (en VO, Jeon Woo Chi), un des gros succès du box-office coréen en 2010 (six millions d’entrées quand même !). Bon je dois bien avouer que je n’ai jamais envisagé qu’un film d’action fantaisiste coréen sortirait en salles en France, donc pas de surprise, même si j’aurais bien voulu revoir au cinéma Kim Yoon-Seok, le charismatique acteur de The Chaser

Les deux autres films, en revanche, je pensais vraiment les voir passer par la case cinéma avant qu’ils ne finissent éventuellement sur galettes. Tout d’abord Into the Fire, annoncé pour le 2 avril, un film prenant pour cadre la Guerre de Corée et pour héros des étudiants embarqués dans le conflit. Frères de sang avait montré que les films traitant du conflit Nord/Sud pouvaient atteindre les salles françaises, mais ce ne sera pas le cas avec celui-ci. Pourtant l’automne dernier, lorsque l’acquisition du film par CTV International avait été annoncée, il semblait que c’était pour une distribution en salles, j’en étais tout heureux… Quelle déception. Le film avait lui aussi bien cartonné en Corée, attirant 3,3 millions de spectateurs.

Mais sans conteste, le film dont le passage expéditif par la case DVD me surprend le plus est Bedevilled de Jang Cheol-Soo. Certes le film n’a pas rencontré le même succès que les deux autres, mais ce film sanglant qui tranche à tout va faisait partie de la sélection de la Semaine de la Critique cannoise en mai 2010, et a remporté le Grand Prix du récent Festival du Film Fantastique de Gérardmer. Je l’avais vu l’an dernier à la Cinémathèque, mais j’étais dans un sale état physique ce soir-là et pour tout dire je me souviens à peine du film à cause de cela. Mais si même les films coréens qui passent par Cannes et remportent des prix dans d’autres festivals français ne se voient pas offrir la chance de sortir en salles…

jeudi 24 février 2011

Césars 2011 : les préférés, les oubliés...

Une des traditions des Césars, en tant que spectateurs, c’est de choisir ses préférés en plus de prédire quels seront les vainqueurs. C’est d’autant plus amusant que la cérémonie est bien moins prévisible que celle des Oscars, les surprises pouvant être nombreuses. Et chaque année, il y a toujours des oubliés. A quelques heures des Césars, l’envie me prend de choisir mes préférés parmi les principaux nommés, et de pointer du doigt celles et ceux qui ont été injustement oubliés par l’Académie. Pour ne pas égrener les catégories, je préfère me concentrer sur dix d’entre elles que voici.

Meilleur Film

Les nommés : L’arnacoeur, Des hommes et des Dieux, The Ghost Writer, Le nom des gens, Gainsbourg (vie héroïque), Mammuth, Tournée.
Mon favori : The Ghost Writer. S’il s’agit là de mon film préféré parmi les nommés, il paraît improbable que Des hommes et des Dieux ne remporte pas le César du Meilleur Film. Et je ne verrais rien à redire à la victoire du beau film de Xavier Beauvois.
L’oublié : La Princesse de Montpensier. Passage remarqué mais non récompensé à Cannes, score honorable sans étinceler au box-office… Le film enthousiasmant de Bertrand Tavernier n’a pas eu les éloges et la carrière qu’il méritait, et il est regrettable que les Césars n’aient pas rattrapé le coup, malgré les sept nominations possibles pour le César du Meilleur Film.

Meilleur Réalisateur

Les nommés : Xavier Beauvois (Des hommes et des Dieux), Mathieu Amalric (Tournée), Roman Polanski (The Ghost Writer), Olivier Assayas (Carlos), Bertrand Blier (Le bruit des glaçons).
Mon favori : Xavier Beauvois. J’aurais dit Polanski, puisqu’il a réalisé mon film nommé préféré, mais le travail de Beauvois pour donner vie à Des hommes et des Dieux est tel qu’il est assurément le cinéaste le plus méritant.
L’oublié : Bertrand Tavernier, forcément. Le réalisateur plein de bouteille a prouvé avec La Princesse de Montpensier qu’il n’avait rien perdu de sa modernité et de son romantisme avec son remarquable film en costume. Qu’il soit oublié au profit de Bertrand Blier me révolte. Ouais, me révolte !

Meilleur Acteur

Les nommés : Gérard Depardieu (Mammuth), Lambert Wilson (Des hommes et des Dieux), Jacques Gamblin (Le nom des gens), Eric Elmosnino (Gainsbourg), Romain Duris (L’arnacoeur).
Mon favori : Voici une catégorie bien difficile à départager. A mes yeux aucun ne se détache franchement. Elmosnino livre peut-être l’interprétation la plus « performance d’acteur », mais les biopics me gonflent un peu, celui-là aussi. Lambert Wilson ne se détache pas de ses camarades dans Des hommes et des Dieux. Depardieu fait du Depardieu. Gamblin est bon, mais de là à dire qu’il est le meilleur acteur de l’année. Et si finalement c’était l’interprétation légère, physique, comique et inattendue de Duris, lui le multi-oublié des Césars, qui était cette année le plus méritant ?
L’oublié : Si l’absence la plus étonnante est certainement celle du déjà Césarisé Fabrice Luchini, réjouissant en 2010 dans Les invités de mon père et Potiche, celle qui l’est moins mais se révèle la plus injuste est sans conteste l’absence de Denis Podalydès, qui portait avec mélancolie et humour le méconnu Huit fois debout. Il paraît à peine concevable que Podalydès, l’un des tous meilleurs acteurs français depuis quelques années maintenant, n’ait été nommé qu’une fois, pour le César du Meilleur Second Rôle dans Embrassez qui vous voudrez il y a huit ans, et c’est tout.

Meilleure actrice

Les nommées : Isabelle Carré (Les émotifs anonymes), Catherine Deneuve (Potiche), Sara Forestier (Le nom des gens), Charlotte Gainsbourg (L’arbre), Kristin Scott Thomas (Elle s’appelait Sarah).
Ma favorite : N’ayant pas vu Elle s’appelait Sarah, pas de Kristin Scott-Thomas pour moi. Celle qui m’a fait le plus sourire et m’a le plus ému cette année, parmi les nommées, s’appelle Isabelle Carré, même si la fougue de Sara Forestier m’a séduit.
L’oubliée : Mélanie Thierry qui offrait une force et une délicatesse au rôle-titre de La Princesse de Montpensier de Tavernier.

Meilleur acteur dans un second rôle

Les nommés : Michael Lonsdale (Des hommes et des Dieux), François Damiens (L’Arnacoeur), Niels Arestrup (L’homme qui voulait vivre sa vie), Olivier Rabourdin (Des hommes et des Dieux), Gilles Lellouche (Les petits mouchoirs)
Mon favori : S’il y a bien un prix que l’on attend cette année, c’est celui qui va être remis à Michael Lonsdale pour son interprétation du frère médecin dans le film de Xavier Beauvois. Il va l’avoir, et il le mérite. Contrairement à Lambert Wilson, Lonsdale est l’âme du film, fort, tranquille, imposant sa présence dès qu’il est à l’écran. Dommage pour François Damiens, inénarrable dans L’Arnacoeur.
L’oublié : Christophe Lambert dans White Material. En ex-mari blasé et lucide, Lambert montre qu’il n’est pas qu’un acteur de direct-to-video, il impose son calme et sa présence avec tranquillité. Il y a quelques années déjà, je l’aurais bien nommé dans cette même catégorie pour Janis et John.

Meilleure actrice dans un second rôle

Les nommées : Valérie Bonneton (Les petits mouchoirs), Karin Viard (Potiche), Anne Alvaro (Le bruit des glaçons), Julie Ferrier (L’arnacoeur), Laëtitia Casta (Gainsbourg).
Ma favorite : Mes deux préférées dans cette catégorie se trouvent dans des films qui ne m’ont pas emballé. Valérie Bonneton, électrique, survoltée, et clairement la meilleure facette des décevants Petits Mouchoirs. Et Karin Viard, secrétaire féministe du théâtral Potiche.
L’oubliée : Marina Foïs, qui montre qu’elle peut être une excellente actrice dramatique dans L’homme qui voulait vivre sa vie d’Eric Lartigau. En femme fatiguée de Romain Duris, Foïs est remarquable.

Meilleur Espoir Masculin

Les nommés : Grégoire Leprince-Ringuet (La Princesse de Montpensier), Raphaël Personnaz (La Princesse de Montpensier), Arthur Dupont (Bus Palladium), Edgar Ramirez (Carlos), Pio Marmaï (D’amour et d’eau fraîche).
Mon favori : Raphaël Personnaz. A mes yeux il écrase la concurrence cette année. Il brille devant la caméra de Bertrand Tavernier, il se montre virevoltant et séducteur, volant chaque scène où il apparaît, magnétique et très bon acteur, avec un petit côté Delon de la grande époque.
L’oublié : Olivier Barthélémy dans Notre jour viendra. L’un des acteurs de Kourtrajmé est en train de se faire une belle place dans le cinéma français. Face à Vincent Cassel, il est désarmant, inquiétant et surprenant. Il y avait largement de la place pour lui dans les nominations.

Meilleur Espoir Féminin

Les nommées : Leïla Bekhti (Tout ce qui brille), Audrey Lamy (Tout ce qui brille), Léa Seydoux (Belle épine), Anaïs Demoustier (D’amour et d’eau fraîche), Yahima Torres (Vénus noire).
Ma favorite : Anaïs Demoustier. C’est la seconde fois, après sa délicate interprétation dans Les grandes personnes, qu’elle est nommée au César du Meilleur Espoir, et elle le méritait déjà à l’époque. La jeune femme fait étale d’un naturel déconcertant et toujours juste devant la caméra, et figure parmi les plus talentueuses des jeunes comédiennes françaises.
L’oubliée : Géraldine Nakache dans Tout ce qui brille. Tant qu’à nommer Bekhti et Lamy, pourquoi laisser sur le côté Nakache ? Okay, ça aurait fait plus de la moitié des nominations pour la distribution d’un même film…

Meilleure Première Œuvre

Les nommés : L’arnacoeur, Gainsbourg (Vie Héroïque), Simon Werner a disparu…, Tout ce qui brille, Tête de Turc.
Mon favori : L’arnacoeur. L’académie a prouvé l’an passé qu’elle savait se montrer audacieuse dans ses choix avec la victoire dans cette catégorie des Beaux Gosses. Et finalement, il n’y a pas eu plus réjouissant cette année dans le cinéma français que l’énergie, l’humour, la fraîcheur et l’audace de L’arnacoeur.
L’oublié : Notre Jour Viendra. Méritait-il d’être nommé ? Bien sûr. Est-ce surprenant qu’il ne le soit pas ? Pas vraiment. Le premier film de Romain Gavras n’est pas franchement consensuel, ni dans la forme, ni dans le ton. Mais c’est son caractère détonnant, et ses qualités cinématographiques propres bien sûr, qui en faisaient un prétendant légitime. Dommage que l’Académie se montre frileuse avec ce film.

Meilleur Film Documentaire

Les nommés : Cleveland contre Wall Street, Benda Bilili !, Entre nos mains, Océans, Yves Saint Laurent – Pierre Bergé : l’amour fou.
Mon favori : Cleveland contre Wall Street ou Océans, aucun des deux documentaires ne m’ont profondément marqué, et ils sont les deux seuls nommés que j’ai vus.
L’oublié : L’épine dans le cœur. Il n’y a peut-être pas plus choquant dans les oublis que celui-ci. Non content d’être le meilleur documentaire de l’année, c’est un des plus beaux films toutes nationalités confondues de 2010. Un portrait des relations filiales tendre et déchirant. Une absence honteuse.

Meilleur Film étranger

Les nommés : Invictus, Les amours imaginaires, The Social Network, Illégal, Inception, Bright Star, Dans ses yeux.
Mon favori : Les amours imaginaires. Xavier Dolan est beaucoup trop talentueux pour son âge, c’est révoltant mais absolument indéniable et magique, à l’image de son second film, un pur moment de poésie cinématographique lorgnant du côté de Wong Kar Wai.
L’oublié : Je ne peux pas en vouloir aux votants de n’avoir pas offert de place à Breathless dans les nominations. En revanche, le Prix du Scénario cannois, Poetry, un des plus grands succès du cinéma d’auteur asiatique ces dernières années en France, pouvait légitimement prétendre à une nomination. L’américain A Single Man et l’espagnol Agora auraient également fait de beaux nommés.

mardi 22 février 2011

Tron, d'un film à l'autre

Il y a deux semaines, Tron représentait un univers mystérieux qui m’était inconnu. Depuis gamin, je regardais d’un drôle d’œil lointain ce film ayant presque mon âge que je n’avais jamais vraiment eu l’occasion ni la motivation de voir. Mais à l’aune de la sortie d’un nouveau Tron, j’avais pris comme résolution de m’atteler à la découverte du premier film, pour mieux apprécier sa suite. En l’espace d’une semaine, ce fut donc un Tron sur canapé puis un Tron : l’héritage sur grand écran que je me suis attelé à voir.

Ma décision de voir le Tron cru 1982 est donc né du désir de voir le cru 2011. A vue de nez, il me semblait bien improbable que ce film qui à l’évidence était inattendu et bluffant il y a près de 30 ans allait me scotcher à mon canapé. Je les voyais déjà, ces affrontements sur grille numérique vieillots qui auraient un petit goût kitsch inévitable. Mais je me devais de le voir. Je me devais de pénétrer cet univers si opaque qui s’est jeté à mon visage dans le premier quart d’heure du film. Quel culot. Qu’on le découvre en 1982 ou en 2011, quel culot de nous propulser sans préambule au milieu de ces programmes à forme humaine. Est-ce un jeu, un logiciel, difficile à déterminer, difficile à analyser, difficile à appréhender. Une seule chose à faire : tenir, s’accrocher, s’avancer dans ce monde virtuel qui ne nous est pas vraiment expliqué.

Au cours de ce premier quart d’heure, je me voyais déjà foncer dans un mur d’incompréhension et de renoncement. Pourtant sans m’en rendre compte, je n’y ai plus pensé. Je me suis détaché de l’opacité. J’ai laissé mes sens être happés par l’errance de Jeff Bridges, ingénieur coincé dans cet ordinateur dont les programmes s’affrontent aux disques et à moto jusqu’à la destruction. J’ai laissé mes sens être happés par ce labyrinthe virtuel à l’esthétique surannée mais à la complexité absorbante et au challenge cinématographique fascinant.

Tron n’est pas le nom de l’univers. C’est celui d’un de ses personnages. Un second rôle du film. Un programme aux qualités combattives remarquables et à la noblesse d’esprit et de cœur qui en font un véritable héros romantique. Il aide le protagoniste, Flynn (Bridges) à se fondre dans l’univers et à le comprendre, il incarne le courage et la droiture. Tron ancre le récit dans l’aventure classique par son caractère, alors que tout autour de lui crie l’irréel, l’immatériel, l’insaisissable. Un univers de pure fantaisie qui brille par son audace qui aura sûrement laissé un paquet de spectateurs désarçonnés, n’ayant su se laisser guider.

Je me suis collé devant Tron pour découvrir sa suite, mais c’est bien un choc cinématographique moderne par son approche du cinéma qui m’a attrapé à la gorge, et qui a su dépasser la simple mise en bouche que j’attendais. Désormais pour Tron : l’héritage, la suite réalisée près de trente ans plus tard par Joseph Kosinski, il s'agissait de relever le défi du film de Steven Lisberger. Un film qui rende hommage à son prédécesseur tout en apportant un coup de sang, un véritable choc qu’il se devait d’honorer.

De choc il est difficile de parler à propos de ce second Tron. Peut-être parce que les mondes virtuels n’ont plus rien d’expérimentaux et de révolutionnaires en 2011. Peut-être parce que la structure narrative de cette suite est plus classique. Mais si de choc il n’est pas question, il s’agit bien là tout de même d’un trip cinématographique qui sait se montrer vibrant. Lorsque l’heure viendra, dans quelques mois, de se remémorer les scènes les plus marquantes de 2011, je m’imagine déjà revivant ce moment grisant intervenant au début du film : après le prologue dans lequel on découvre le fils de Flynn enfant, un saut dans le temps nous le fait rattraper de nos jours, la vingtaine (campé par Garrett Hedlund), fonçant à moto sur une route nocturne. Les premières notes de la bande originale de Daft Punk retentissent alors. Un morceau jouissif, totalement inattendu en tant que bande originale de film, accompagne la fluide course de l’engin à travers la ville. A ce moment-là je ne pensais plus à rien, mon corps n’avait plus qu’une fonction, celle de profiter de l’instant. De prendre mon pied cinématographique. Un trip énorme s’annonçait.

C’est bien cela la différence entre Tron ’82 et Tron ’11. Le second n’est pas capable d’envoyer l’électrochoc surprenant du premier, ce n’est plus l’époque pour. Alors il joue à fond la carte du trip. D’abord en nous faisant pénétrer un univers visuel ultra léché, imposant, sombre mais teinté de flash de couleurs, prenant ponctuellement forme avec une 3D qui sait, contrairement à ses nombreux prédécesseurs sur le format, ne pas se montrer trop intrusive et excessive. Elle est distillée plus qu’imposée.
L’autre élément essentiel du trip, c’est la musique confiée aux frenchies Daft Punk. Elle le donne le pouls du film, elle fait battre un rythme constant et hypnotisant, transportant parfois certaines séquences dans une dimension hallucinante, comme cette séquence en moto évoquée plus haut.

Il y en aurait des choses à reprocher à cette version 21ème siècle de Tron. Son manque d’audace narrative, ses retournements un peu attendus, son excès de Jeff Bridges numérique (alors que le Jeff Bridges naturel et barbu a une stature impressionnante et un petit éclair zen rappelant le Dude de The Big Lebowski), son absence trop grande du personnage emblématique qu’est Tron. Mais malgré cela, le film parvient à dépasser ses défauts pour nous faire naviguer dans les eaux du fantasme, de l’aventure en phase avec son époque, de l’expérience cinématographiques trippante. Le choc n’est plus là, mais c’est une glissade dans le rêve qui se vit, dans les sensations. Et c’est déjà un bonheur indéniable.

lundi 21 février 2011

J'ai testé le cinéma kirghize

La diversité au cinéma, il n’y a que ça de vrai. Si quand j’étais ado je me contentais avec bonheur des films français et américains, plus quelques exceptions par-ci par-là, cette époque est loin derrière moi. Plus le temps passe, plus mon envie de cinéma chemine par un désir d’ailleurs. De tous les coins du monde. Je n’arrive plus à me satisfaire des films dont tout le monde parle. Je veux voir aussi ceux qui m’emmèneront ailleurs à la découverte d’hommes, de femmes, de cultures et de paysages qui me transporteront dans la nouveauté. C’est cette curiosité qui m’a poussée peu à peu vers le cinéma coréen. J’aime désormais mettre mon confort de spectateur en danger et goûter à tout (jusqu'au cinéma bulgare).

J’ai commencé 2011 en douceur, avec à peine plus de vingt passages dans les salles obscures pour le moment, mais j’ai réussi à aller fureter un peu partout. Ainsi, entre les films américains et français de rigueur, j’ai pris le temps depuis le 1er janvier d’aller explorer des films espagnols, britanniques, mexicains, japonais, canadien, chinois et argentin (et j’ai bien l’intention d’en voir un iranien et un chilien dans les jours qui viennent…). Et kirghize. Ce n’est pas tous les jours qu’il est donné de voir un film de cette petite contrée asiatique de l’ex URSS. Alors forcément, ma soif de films exotiques (et oui, le Kirghizstan c’est exotique au cinéma !) a répondu présente pour voir à quoi cela ressemblait, un film de là-bas.

Le film en question, c’est Le voleur de lumière, un film de festival notamment passé par la Quinzaine des Réalisateurs 2010 qui va sortir en salles dans quelques jours. Le réalisateur, Aktan Arym Kubat, interprète lui-même le rôle-titre du film : un électricien fournissant illégalement de la lumière à ceux de son village qui n’ont pas les moyens de payer l’électricité. Tout le monde l’appelle Monsieur Lumière. Il va de maison en maison éclairer les autres, rêvant d’éoliennes pendant que la région est suspendue aux élections qui voient des hommes en costards sans scrupules traîner dans les environs. Avec sa bouille mi-tragique mi-comique qui rappelle Takeshi Kitano, Aktan Arym Kubat est le cœur d’un film qui sous le calme et la simplicité cache un portrait attentif et engagé sur la situation du pays. Un pays qui depuis qu’il est sorti du giron soviétique peine à se stabiliser politiquement et où la corruption gangrène la société.

Sous ses atours de film posé, Le voleur de lumière s’inquiète de cette instabilité constante, de ces dents longues venant renifler l’herbe là où elle est à brouter. Il s’inquiète de cette recherche de profit et de pouvoir se faisant toujours au détriment des plus faibles. Derrière les sourires de la fiction, Kubat dessine en filigrane l’incertitude, la mélancolie. Mais sourires il y a bien. Le voleur de lumière s’appuie sur une légèreté parcourant joliment le film. A commencer par ceux de cet électricien Robin des Bois, escaladant les piquets et les arbres, doux rêveur qui choisit d’embrasser son prochain sans arrière-pensée. Il y a aussi ce regard sur ses concitoyens, leurs sourires, leurs drôles de chapeaux blancs plantés sur la tête avec une bonhomie charmante et poétique. Une atmosphère cocasse se rapprochant parfois de celles du cinéma est-européen.

J’ai découvert le cinéma kirghize. Un cinéma simple, dont la douceur cache des cris sourds de détresse.

samedi 19 février 2011

Souvenir... J'ai failli voir Le Monde Perdu en espagnol

Quand j’ai commencé L’impossible blog ciné, un des buts premiers était de raconter mes aventures dans les salles obscures autant que parler des films que je voyais. Ce qui est dommage c’est que si, avec toutes mes expéditions dans les salles obscures parisiennes, je rencontre des gens et vit des situations décalées que je ne peux m’empêcher de décrire dans ces pages, ma vie de spectateur n’a pas commencé en décembre 2008 avec ce blog. J’ai fait mes premiers pas de spectateurs dans les années 80, découvert mon envie de cinéma dans les années 90, et développé ma cinéphilie dans les années 2000. Ca en fait des aventures vécues. Des histoires à raconter. Certaines oubliées, certainement. D’autres gravées dans ma mémoire.

Alors forcément, cette pensée s’est mise à trotter dans ma tête, pourquoi ne pas partager quelques souvenirs de spectateurs en culottes courtes et de cinémaniaque en devenir qui traînent dans les recoins de ma mémoire de quasi trentenaire (c’est si peu, et pourtant cela paraît déjà tant…), au fil du blog, plus ou moins régulièrement ? Attendez, j’en discute avec mon comité de rédaction… t’en penses quoi David ? Pas mal l’idée, ça peut être marrant. Allez go. Adjugé.

Mais par où commencer ? La liste des films, des cinémas et des souvenirs est longue. Mon premier souvenir de cinéma, je l’ai déjà raconté, pas besoin de cibler la chronologie, de toute façon ma mémoire n’est pas assez bonne pour cela. Alors au gré des envies et des fulgurances du passé, ça sera plus drôle. Pourquoi pas un peu de soleil en ce gris jour de février… Laissez-moi vous raconter comment j’ai failli voir Le Monde Perdu en espagnol. Oui pour faire original, je vais vous raconter comment je n’ai pas vu un film. Pourquoi pas.

Remontez vos montres quatorze années en arrière. Vous arrivez à vous faire une photo mentale de l’époque ? Moi à peu près. C’est l’été 1997 et je n’ai pas encore 16 ans. En bon fils de divorcés que je suis, l’été c’est le bénéfice de partir deux fois, et après la Normandie avec ma mère en juillet, c’est direction l’Espagne avec mon père (faut bien que ça ait du bon les déchirements familiaux !). Je me souviens de la route, longue (en voiture !), jusqu’aux abords de Valence, pas loin de la côte. Une maison, perchée sur une route montante, une maison où vit une vieille espagnole, des amis d’amis de mon père, une piscine dans le jardin, deux jolies sœurs espagnoles dont l’une avait mon âge.

Combien de temps sommes-nous restés, je ne sais plus. Que faisions-nous de nos journées (à part la piscine…) je ne sais plus. Mais je me souviens qu’en ces jours d’août 1997, Le Monde Perdu, la suite tant attendue de Jurassic Park, était déjà sorti en Espagne. Probablement un des films que j’attendais le plus cette année-là. Nouveau Spielberg, suite d’un des meilleurs blockbusters jamais produits à Hollywood, comment ne pas attendre avec impatience un tel évènement cinématographique ? Malheureusement, la France à l’époque était la championne pour sortir les films les plus attendus longtemps après la bataille, les distributeurs hexagonaux étant frileux en été et préférant lancer leurs gros films à l’automne (aaah, La menace fantôme…). Résultat, alors que le monde entier avait eu droit au Monde Perdu au cours de l’été 97, en France, il fallait attendre la fin octobre pour pouvoir le découvrir. L’avènement du piratage sur Internet aura au moins forcé les distributeurs à ne pas attendre des mois pour sortir leurs blockbusters.

Mais en 97, l’idée de l’attente d’un film était tout autre, et la perspective de voir Le Monde Perdu en avance s’est ainsi présentée à moi. Les deux sœurs espagnoles sortaient un soir avec des amis pour aller le voir et nous proposaient dans l’excellent français qu’elles parlaient (nettement meilleur que mon espagnol), à ma sœur et moi, d’aller le voir avec elles. Rétrospectivement, je me rends compte qu’en ce jour d’été 1997, j’ai fait preuve d’un des mes premiers actes de cinémaniaque. Alors que ma sœur a sauté sur l’occasion et a accepté l’offre des sœurs… j’ai décliné. La perspective de sortir avec de jeunes espagnol(e)s avait beau me tenter, les sœurs nous avaient prévenues que le film serait doublé en espagnol et non en version originale.

A l’époque, l’idée d’aller voir des films autrement qu’en VO ne me gênait pas encore trop, mais là il ne s’agissait pas de VF. Il s’agissait de voir l’un des films que j’attendais le plus dans une langue étrangère que j’aurais bien du mal à suivre, et qui très certainement ferait que je ne comprendrais pas grand-chose aux dialogues. Et moi je l’attendais trop pour me contenter d’une version que je comprendrais à peine. Pas question de le voir en espagnol. J’ai dit non. J’ai dit non aux jolies espagnoles (l'une des soeurs était craquante...), non à un film que je pouvais voir près de trois mois avant sa sortie française, à la grande surprise de mon père qui ne comprenait pas comment je pouvais dire non à une telle proposition. Et je dois bien avouer qu’aujourd’hui, si je pouvais remonter le temps, je changerais d’avis et j’irais le voir, Le Monde Perdu en espagnol. Le frisson de la confrontation hollywoodienne aux dinosaures de Spielberg se serait facilement laissé apprécier en espagnol, j’en suis aujourd’hui certain.
Ma sœur était revenue de la soirée enthousiaste, me racontant que j’aurais halluciné de voir comment les espagnols se comportaient dans la salle, allant et venant souvent pour aller chercher des boissons, des pop-corns et autres, pas aussi sages qu’en France. Elle m’a aussi raconté le film sans me spoiler, me racontant ce qu’elle en avait compris.

Nous avons quitté l’Espagne quelques jours plus tard, y laissant pour ma part ce double regret d’être passé à coté d’une ravissante espagnole et d’un Spielberg en avant-première. J’ai finalement vu Le Monde Perdu plus de deux mois plus tard, à Paris, constatant au passage que ma sœur n’avait pas tout compris des relations entre les personnages (mais comment avait-elle pu comprendre que Julianne Moore jouait une lesbienne ?!). Quatorze ans plus tard, je ne me souviens pas de l’avoir revu depuis, mais je me souviens toujours de ce jour de 1997 où j’ai dit non à une espagnole qui voulait que je vienne le voir avec elle. Ce qu’on peut être con quand on est ado.

jeudi 17 février 2011

Le Discours d'un Roi mérite-t-il sa réputation irréprochable ?

Dans une dizaine de jours, la cérémonie des Oscars se tiendra à Hollywood, et il semble plus que probable que Le Discours d’un Roi reparte avec quelques statuettes, et pas des moindres. Ce « petit » film britannique (d’après le standard américain, car vu d’Europe, le film n’a rien de petit) est devenu le film à voir absolument, d’abord outre-Atlantique en fin d’année, et depuis quelques semaines en Europe, où il s’est rendu incontournable au box-office. La France ne fait pas exception, et le film semble déjà assuré de passer les deux millions d’entrées en fin de parcours.

Si le succès du film est tel, le bouche-à-oreille n’y est pas étranger. Moi-même j’ai été l’un des premiers à me précipiter, deux jours après la sortie du film, prêt à découvrir ce qui s’annonçait être un des grands films de l’année. La promesse d’une grande histoire, celle du roi britannique George VI cherchant à dépasser son problème d’élocution pour devenir le grand leader dont son peuple avait besoin à la veille de l’entrée dans la Seconde Guerre Mondiale. La promesse d’émotion, de rire, de grandes performances d’acteurs. Oui l’attente était grande. Car depuis que la saison des récompenses a commencé aux États-Unis, Le Discours d’un Roi rafle tout ou presque. Tous les prix précédant (et généralement préfigurant) les Oscars, le film de Tom Hooper les a collectionnés. Et les spectateurs semblent unanimement conquis.

L’attente était pourtant trop grande. Bien sûr qu’elle était trop grande. Elle l’était parce que Le Discours d’un Roi n’est qu’un bon petit film. En soit cela n’a rien de déshonorant de n’être qu’un film mineur lorsqu’il est assumé comme tel, mais la campagne et le buzz du film lui donne des grands airs qu’il ne semble pouvoir assumer.
Qu’attendais-je du Discours d’un Roi ? J’attendais une belle petite histoire inscrite dans la plus grande. J’attendais que ce film ancré dans un cadre historique fort – l’héritage du Royaume pour un Prince qui ne se voit pas roi mais doit s’affranchir de sa modestie, l’entrée en Guerre de la Grande-Bretagne dans le conflit contre l’Allemagne – se montre ambitieux. Mais je n’ai pas trouvé d’ambition à la hauteur dans l’œuvre de Tom Hooper.

J’y ai vu une jolie petite histoire, celle d’un homme affublé d’un sévère bégaiement qui va s’appuyer sur les méthodes peu orthodoxes d’un spécialiste pour affronter ce défaut. C’est l’aspect réussi du film, le dépassement de soi. C’est le cœur du film. Mais c’est à peu près la seule profondeur que le film s’accorde, avec la relation teintée d’amitié entre le bègue et son orthophoniste. Le poids de l’héritage paternel royal sur le fils princier ? La difficulté de trouver sa légitimité gouvernante ? La place de l’Angleterre au sein d’une Europe devant faire face à Hitler et à la poussée du Nazisme ? Le dépassement de soi portant sur la fonction même du nouveau roi ? Tout cela est balayé, soit esquissé au second plan, soit quasi absent.

Tom Hooper a choisi de ne pas réaliser un film sur l’époque dépeinte, ou si peu. Il a préféré se concentrer sur la relation humaine en son sein. Il a préféré se contenter d’un thème presque passe-partout, presque anodin, en ne s’appuyant pas sur le cadre historique fort qui s’offrait à lui. Oui, Colin Firth et Geoffrey Rush livrent deux interprétations riches et admirables. Oui, Colin Firth va remporter l’Oscar qu’il aurait dû recevoir l’an dernier pour A Single Man. Mais le personnage déçoit. Il lui manque un souffle, la dimension des combats que l’homme avait à mener autres que son bégaiement. Il nous manque toute la richesse du contexte politique. N’y avait-il donc rien à dire sur ce que l’homme a pensé et réalisé ? L’Angleterre entrait à l’époque dans une des périodes les plus fortes du siècle, et voici qu’un film dont son roi de l’époque est le héros ne montre jamais ce que celui-ci a bien pu penser ou accomplir. Penser. Ne serait-ce que penser.

Il serait facile de balayer un tel reproche en arguant qu’il ne s’agit pas du but du film, que c’est la relation humaine qui est essentiel, et le combat personnel du roi contre son bégaiement, mais cette excuse est trop facile, et ne peut convaincre lorsque l’engagement dans le film en pâtit. Lorsque le roi prononce le fameux discours du titre, je voudrais être emporté par la parole de cet homme, par ce qu’il dit, ce qu’il exprime, ce qu’il a à dire à son peuple. Mais il n’en est rien. Car le roi, alors, n’a rien à dire à son peuple. Il ne fait que lire. Il n’exprime pas sa conviction, il ne porte pas haut ses mots. Il lit ce qu’on lui a écrit, et rien dans ce que le film nous aura montré jusque là ne nous indique vraiment ce que ce bon roi pense de ce qu’il lit.

Comment l’émotion peut-elle naître ainsi ? Certes la symphonie de Beethoven résonnant durant ces quelques minutes donne de la grandeur à la scène, mais le mérite en revient plus à Beethoven qu’au film lui-même. Malgré cela oui, le film se regarde avec quelque plaisir, facilement, sans ennui (ni vraie surprise). C’est un film agréable. Un bon p’tit film. Qui va peut-être triompher de Toy Story 3, Inception, The Social Network et Black Swan aux Oscars. Et je ne pense pas que ce soit mérité.

lundi 14 février 2011

Black Swan, la danse de la souffrance

Qu’est-ce qui fait un grand film ? Le plaisir que l’on a à le regarder ? Le bien-être qu’il nous procure ? La perfection technique qu’il déploie ? L’émotion qu’il dégage, ou qu’il nous fait ressentir ? Tout cela à la fois ? C’est possible. Cela peut être cela. Cela peut aussi être tout autre chose. Black Swan est-il un grand film ? Je ne sais pas. Je sais le mal-être que j’ai ressenti à le regarder. Le malaise dans lequel il m’a plongé tout du long.

Je sais que je n’ai pas aimé le personnage principal, Nina Sayers, cette jeune danseuse qui se voit offrir le rôle principal du Lac des Cygnes que sa troupe va jouer dans quelques semaines. Elle se trouve sous le feu des projecteurs et se demande si les autres danseuses, une en particulier, ne jalousent pas la confiance que lui a accordée Thomas Leroy, le chorégraphe. Je n’ai pas aimé Nina Sayers. Non, c’est faux. Je n’ai pas ressenti d’empathie pour Nina Sayers, ce qui est différent. Je n’ai en fait ressenti d’empathie pour aucun des personnages de Black Swan. Habituellement, c’est assez rédhibitoire dans mon appréciation d’un film (hum… Arnaud Desplechin… hum…).

Le malaise est donc parti de ces personnages. Il ne s’est pas arrêté là. Il s’est ensuite engouffré dans l’atmosphère. Ce New York sombre, glauque, déprimant. Cette déglamourisation total d’un univers qu’il serait si facile de présenter dans la lumière. Mais la lumière, dans Black Swan, n’est là que pour mettre en valeur la noirceur. Sans lumière, pas d’ombre, et c’est l’ombre qui intéresse Darren Aronofsky. Elle l’a toujours intéressée, de Requiem for a dream à The Wrestler, pour s’y complaire ou pour en sortir.

Ici, la noirceur passe par l’obsession. L’obsession de la perfection qui engendre la souffrance physique. Cette souffrance, je l’ai vécue en tant que spectateur. Aronofsky nous plonge dans la peau de Nina. Je ne suis pas parvenu à éprouver de l’empathie pour elle, pourtant je ne voyais qu’elle. Elle habite le film, son obsession donne son pouls à Black Swan. Natalie Portman, future Oscar de la Meilleure Actrice pour ce rôle, dévore le personnage et le film. La frêle jeune femme livre une performance phénoménale. Sous nos yeux sa Nina tremble et gémit, elle danse et virevolte, elle se consume autant qu’elle explose.

Mais il ne s’agit pas là que d’une « performance ». Black Swan n’est pas un film qui procure du plaisir ou du bien-être comme le peuvent d’autres. Les douleurs à l’écran deviennent nos douleurs. La peur à l’écran devient notre peur. Mais là où d’autres films dégouteraient d’une telle pression psychologique et d’une telle douleur, Black Swan déploie une virtuosité. Une virtuosité qui se fait passion. L’attention est aspirée dans la douleur et le malaise. « Le lac des cygnes » résonne et de la tourmente nait l’obsession.

Je n’ai pas pris de plaisir à regarder Black Swan. J’ai souffert. Je me suis tortillé sur mon siège face aux affres de cette héroïne que je n’aimais pas mais qui me fascinait. Mais derrière la souffrance a peu à peu grandi la puissance, jusqu’à une incandescence d’émotions. Je n’ai pas pris de plaisir à regarder Black Swan. Il ne m’a pas fait ressentir de bien-être. Mais il m’a accroché, scotché, fasciné. Il m’a pris à bras le corps et m’a emporté dans les tréfonds de la noirceur humaine, où la lumière est si faible qu’elle éclate d’une blancheur éblouissante. Black Swan est-il un grand film ? Bien sûr.

vendredi 11 février 2011

2011 nous a déjà offert du beau cinéma

Les semaines passent, 2011 se fait de plus en plus concrète, et je me rends compte que je ne parle pas assez des films qui m’ont séduits depuis le début de l’année. J’ai passé tant de temps à réfléchir à ceux qui m’avaient marqués en 2010, et à écrire à propos de ceux qui me font rêver pour les mois à venir, que je n’ai pas pris la peine de dire qu’en ce début d’année, il y avait déjà eu du beau cinéma. Enfin si, une fois. Mais il y a eu encore mieux que The Green Hornet (et là j’en entends déjà grogner devant leur écran « C’était même pas si bien que ça le Gondry d’abord ! »).

Bien sûr il y a eu deux tiers d’un bon film pour Eastwood. Bien sûr il y a eu Luis Tosar et Même la pluie. Mais il y a surtout eu Sofia Coppola et Denis Villeneuve. Somewhere et Incendies. Une exploration de la vacuité existentielle et une quête identitaire à travers les années. Des siestes en bord de piscine privée pour l’un, des révélations humaines en piscine publique pour l’autre. Des tours de circuit en Ferrari pour l’un, des traversées périlleuses à travers les balles pour l’autre. Deux films qui n’ont rien à voir, mais deux films qui marquent le début de l’année de l’empreinte de leur qualité.

Somewhere, ou le pouvoir de l’hypnotique. Incendies, ou le pouvoir du récit. Je suis sorti hébété et fasciné du premier. Je suis sorti hébété et ému du second. Non, Coppola n’a pas volé son Lion d’Or à Venise. Oui, le Canada mérite de décrocher l’Oscar du Meilleur film en langue étrangère à la prochaine cérémonie hollywoodienne. Je pourrais en tartiner des lignes entières, mais parfois être concis suffit à exprimer l’admiration et l’émotion.

mardi 8 février 2011

Largo Winch 2 : Avant-première au pays des cravates

Il y a deux ans, Largo Winch, le fameux héros de bande dessiné créé par Van Hamme et Franck, prenait enfin vie au cinéma grâce à Jérôme Salle et sous les traits de Tomer Sisley. Si le film, doté d’un gros budget et d’une sortie évènementielle, n’avait pas été LE gros carton de l’année, il avait suffisamment bien marché pour ouvrir la voie à une suite. L’ancien lecteur de Winch que j’étais avait été séduit par la transposition cinématographique, une percée musclée et divertissante de cinéma d’aventure français. Une suite se doit d’être à la hauteur du film qu’elle suit. Elle se doit même d’être meilleure. Lundi soir, j’ai eu l’occasion d’aller constater si Largo Winch 2 (j’aurais tellement préféré qu’un vrai titre soit donné à la suite plutôt que ce laconique « 2 » apposé) est un meilleur film que Largo Winch.

La projection avait lieu dans un cadre… assez inhabituel. Il s’agissait d’une avant-première (le film sort en salles le 16 février) organisée par TF1, partenaire du film. Je m’engouffrais dans les locaux de la chaîne en tant que guest de mon ami Rick, invité à la soirée. Oui car en fait d’une simple projection du film, il s’agissait d’une véritable petite sauterie, avec champagne, amuse-bouches et costards cravates en veux-tu-en-voilà. S’il n’y avait eu ici ou là quelques invités habillés d’un simple pull, j’aurais pu croire que le port du costard cravate était obligatoire tant je me suis senti cerné. Parmi cette petite centaine de spectateurs tirés à quatre épingles, ou plutôt en plus d’eux, la productrice du film, Nathalie Gastaldo, le réalisateur du film, Jérôme Salle, et la star du film, Tomer Sisley.

Après une petite coupe et de quoi se caler un peu l’estomac, direction la salle de projection de TF1, un joli petit auditorium capable d’accueillir, à vue de nez, une bonne centaine de spectateurs. Pendant que les pompiers enfoncent la porte des toilettes pour libérer un enfant coincé à l’intérieur (véridique), Rick et moi prenons place dans cette confortable salle faite de larges fauteuils en cuir, au cœur de ce cinquième rang laissant un bon mètre à nos jambes pour s’étaler. Je ne connaissais pas la salle de TF1, je dois bien avouer qu’elle est idéale pour voir un film. Gastaldo, Salle et Sisley nous gratifient d’un petit speech détendu avant le début du film. Laurent Storch, monsieur TF1 ce soir-là, la joue MC, Sisley fait un p’tit show sympa. Ambiance détendue. Apparemment, la plupart des invités sont des annonceurs. Sisley prévient qu’il les brosse dans le sens du poil car ils donnent du fric à TF1, fric que TF1 donne ensuite à Nathalie Gavaldo, qui elle-même l’investit dans le film, le réalisateur, et lui, Tomer Sisley. Alors c’est ça le public ce soir, des publicitaires. Avec Rick, on se sent on peu seuls au milieu des costards cravates. Mais personnellement je viens pour le film, donc le reste… Tomer nous annonce que cette suite est meilleure que le premier. Facile à dire pour l’acteur. A nous d’en juger.

Largo Winch 2 ne part pas du bon pied. Le début du film est déjà lassant. Il commence par un « Trois ans plus tôt » sorti de nulle part (avant quoi, le film commence tout juste ?), repart vers un « Trois ans plus tard », avant de revenir « Trois ans plus tôt » pour finalement choisir de revenir « Trois ans plus tard ». Wow. Du calme. Pouce. Laissez-moi respirer. Laissez-moi m’imprégner du film un peu, pleaaase. Après ces premières 20 minutes, je suis persuadé que Sisley s’est trompé. Non, Largo Winch 2 ne risque pas d’être meilleur que Largo Winch. Mais le film trouve finalement une allure. Les allers-retours fatigants laissent la place à une intrigue présente qui se met en place. L’action prend forme. A la suite du premier film, Largo Winch se trouve donc à la tête de l’empire W hérité de son père disparu. Mais Largo ne veut pas de cette vie-là. Il veut vendre la compagnie et se consacrer à l’humanitaire. Pourtant, du passé, un doute surgit. Un procureur international accuse la compagnie W d’avoir financé un massacre perpétré en Birmanie trois ans plus tôt. Largo est poursuivi pour complicité de crime contre l’humanité. A lui de découvrir ce qui se trame derrière cette accusation.

Après les laborieuses premières minutes du film, Largo Winch 2 prend peu à peu forme. L’action, se projetant de la jungle birmane aux dédales de Bangkok, des gratte-ciels de Hong Kong aux banques suisses, gagne en intensité. Les personnages prennent de l’épaisseur. Du premier film, hormis Largo, presque tous les autres personnages disparaissent tout à fait ou sont relégués à l’arrière-plan. Tous ? Non. Il en est un qui au contraire s’étoffe. Celui-là même que j’avais regretté ne pas plus voir dans le premier opus. Gauthier, le valet de Largo. Un drôle de personnage, intelligent mais guindé, qui en l’espace de deux ou trois scènes seulement existait totalement dans le premier film. Dans cette suite, les scénaristes ont eu le flair de faire de Gauthier l’homme de confiance de Largo, remplissant pour lui une mission importante et au passage apportant la fraicheur d’un ressort comique tout en finesse.

Mais Jérôme Salle Julien Rappeneau, auteurs du scénario, ne se contentent pas de Gauthier. Ils ont la bonne idée de faire surgir Simon, celui qui dans la BD était le meilleur ami de Largo, un séducteur invétéré formant une belle équipe avec le héros. Il est ici introduit de façon saugrenue. Il apparaît naïf et dépassé dans la jungle birmane, et à deux doigts de la mort si Largo ne passait pas dans le coin. Du sauvetage de Simon par Largo va non seulement naître un nouveau Simon, larguant son ancienne existence pour dévorer la vie pleinement, mais il va surtout naître un partenaire pour Largo Winch. Un partenaire non pour les affaires, mais pour l’aventure.

Et c’est là toute la force de Largo Winch 2. Les scénaristes apportent ce qu’il manquait dans Largo Winch. Une garde rapprochée. Un doublé de sidekicks irrésistibles, l’impeccable mais gringalet Gauthier et l’improbable mais fidèle Simon, chacun parfaitement campé par Nicolas Vaude et Olivier Barthélémy. Lorsque ce dernier survit à une chute en plein ciel grâce à la dextérité de Largo, qui le rattrape en plein vol, il a dégringolé quelque milliers de pieds en chute libre, hurlant. Lorsque Largo le relève, au sol, et lui demande si ça va, Simon répond avec désinvolture un « Ouais » si simple qu’il en est hilarant.

C’est en apportant ces détails aux cruciaux seconds rôles que Largo Winch 2 réussit son pari d’enrichir l’épisode précédent. Bien sûr il y a aussi la beauté éclatante de Napakpapha Nakprasitte, le charme vénéneux de la cougar Sharon Stone, et la présence fascinante, fantomatique et posthume de Laurent Terzieff. La réussite de Largo Winch 2 ne saurait s’arrêter à deux personnages. Pourtant ils y contribuent amplement.

Le public d’annonceurs n’est pas amateur de générique de fin. Ils se sont tous vite levés, et étaient partis depuis longtemps lorsque Rick m’expliquait encore en quoi l’excellente séquence de chute libre renvoyait à Moonraker, et cette autre séquence d’action dans une salle de bain était une référence directe à Goldfinger. Si tu le dis, Rick, c’est toi le spécialiste en James Bond. Tant qu’on est d’accord sur les qualités de Gauthier et Simon, je veux bien te croire.

lundi 7 février 2011

Onze films pour 2011

Chaque année j’ai envie de parler des films des mois à venir qui excitent le plus mes papilles cinéphiles, et chaque année, je m’y prends un peu tard. Mais il n’est jamais trop tard, après tout, pour mettre en avant des films faisant battre la chamade et ne sortant pas avant plusieurs semaines voire mois. Comme tout les ans, les films sortant dans un futur immédiat n’ont que peu d’intérêt pour un tel billet (ou plutôt une telle liste). Je préfère attraper mes jumelles pour voir en avant. Du coup, rétrospectivement, je me rends compte qu’il y a un an, j’ai fantasmé sur des films dont plus de la moitié ne sont sortis ou ne sortiront qu’en 2011. J’ai été un peu trop gourmand. Du coup, non, je ne parlerai pas des prochains Terrence Malick (mon film le plus attendu de 2011, soyez-en sûrs), Wong Kar-Wai, David Gordon Green ou Tran Anh Hung. J’ai beau les attendre autant que les films qui vont suivre, ils constituaient déjà mes films les plus attendus de 2010. Pour 2011, les heureux élus sont les suivants…

Source Code
De Duncan Jones, avec Jake Gyllenhaal, Vera Farmiga, Michelle Monaghan, Jeffrey Wright.
Les premiers films formidables peuvent être de beaux pièges pour les jeunes cinéastes. Trop d’attente autour du second film peut s’avérer à double tranchant. Le premier film de Duncan Jones, la captivante aventure spatiale Moon, est l’un des meilleurs films de science-fiction de ces dernières années… forcément après un tel long-métrage on attend beaucoup de ce qu’il nous offrira avec Source Code. Mais force est de constater que ce second film a l’air bien alléchant. Son concept est fort : une expérience militaire pousse un soldat à revivre plusieurs fois un attentat dans un train pour tenter de découvrir l’identité du terroriste. Dans la peau du voyageur dans le temps, Jake Gyllenhaal, qui a bien besoin de retourner à un cinéma excitant après une période flemmarde.
Sortie le 20 avril.

La conquète
De Xavier Durringer, avec Denis Podalydès, Bernard Lecoq, Samuel Labarthe, Florence Pernel.
Le cinéma français s’intéresse bien trop peu à la politique contemporaine pour qu’on puisse se permettre de ne pas attendre avec impatience cette Conquète. Imaginez plutôt, se pencher sur l’ascension de Sarkozy vers le pouvoir, alors que celui-ci est encore en place à l’Élysée ! La frilosité, ça ne connait pas Xavier Durringer, réalisateur de J’irai au paradis car l’enfer est ici, ça tombe bien. Quel que soit le résultat, le projet est d’ores et déjà important et excitant. D’autant que le réalisateur fait se glisser un des plus grands acteurs français, Denis Podalydès, dans la peau de Sarko (le rôle avait été offert à François Cluzet, qui a préféré se retirer, ne sachant pas par quel bout prendre le rôle). Si cela pouvait réveiller le cinéma politique français…
Sortie en mai.

Meek’s cutoff
De Kelly Reichardt, avec Paul Dano, Michelle Williams, Bruce Greenwood, Will Patton, Shirley Henderson.
Au rayon cinéma indépendant, Kelly Reichardt est l’une des belles découvertes de la décennie écoulée. Avec Old Joy et Wendy et Lucy, la réalisatrice s’est approprié un pan du cinéma naturaliste et social américain avec une douceur et une amertume vivifiantes. Nul doute qu’on trouvera encore de cette patte dans ce Meek’s Cutoff qui s’annonce être un western plus porté sur le réalisme que sur l’action. Mon amour pour le genre plus le travail de Reichardt sont une combinaison qui font du film un incontournable de 2011 à mes yeux. D’autant qu’au casting on trouve le fascinant Paul Dano et la délicate Michelle Williams.
Sortie en juin.

J’ai rencontré le diable
De Kim Jee-Woon, avec Choi Min-Sik, Lee Byung-Hun.
Kim Jee-Woon n’a peut-être pas la renommée de Park Chan-Wook ou Bong Joon-Ho, sa filmographie n’en demeure pas moins une des plus passionnantes de ces dernières années, cumulant de la comédie sociale (The Foul King), du film noir stylisé (A bittersweet life) ou du western débridé (Le Bon, la Brute et le Cinglé, son apothéose à mes yeux !). Une carrière suffisante pour mettre nos sens en éveil autour de son nouveau film, mais il faut en plus qu’il tricote un film noir à la réputation sulfureuse et mettant face-à-face Lee Byung-Hun et Choi Min-Sik pour un jeu du chat et de la souris qui s’annonce sanglant. Comment ne pas s’impatienter de cette sortie qui tarde ?
Sortie le 6 juillet.

Super 8
De JJ Abrams, avec Kyle Chandler, Elle Fanning, Noah Emmerich, Ron Eldard.
Jusqu’ici, le créateur de « Lost » a gardé un pied dans la télévision en s’attelant au cinéma, réalisant Mission : Impossible III et Star Trek. C’est peut-être avec son troisième film que l’on va enfin découvrir quel cinéaste est JJ Abrams. A l’heure de Facebook, Twitter et des blogs, l’heure où l’on sait tout des films au fur et à mesure qu’ils se fabriquent, Abrams est l’un des rares à Hollywood sachant entretenir le mystère. Jusqu’à ce week-end, un article du LA Times et un spot de pub diffusé pendant le Superbowl, on ne savait trop qu’attendre de Super 8. On en a désormais une idée un peu plus précise, et cela fait saliver : une bande d’adolescents dans l’Amérique des années 70, rêvant de réaliser leur film de zombies, voient la vie de leur patelin bouleversé par une créature surnaturelle lâchée en liberté suite à un accident de train. Abrams annonce que le film sera autant une chronique adolescente dans l’Amérique 70’s qu’un film d’aventure SF. Avec Spielberg à la production et Kyle Chandler enfin devant la caméra, Super 8 s’annonce comme un grain d’originalité excitant au milieu de la production hollywoodienne lambda.
Sortie le 3 août.

Cowboys & Envahisseurs
De Jon Favreau, avec Daniel Craig, Harrison Ford, Sam Rockwell, Olivia Wilde, Paul Dano.
Tant qu’on parle d’extraterrestres, parlons du nouveau film de Jon Favreau. Bon, ok, Favreau s’est planté avec Iron Man 2. Le film fut une cruelle déception après le fun du premier, mais le réalisateur s’est depuis attelé à un projet autrement plus intrigant : l’adaptation d’un comic book dans lequel des cowboys voient débarquer dans le Far West du 19ème siècle une invasion d’aliens belliqueux. Le pitch fait saliver. Et avec ça, Favreau s’est payé le luxe d’appeler Harrison Ford pour enfiler le stetson et faire face à un mystérieux Daniel Craig. Indiana Jones et James Bond en cowboys contre des extraterrestres ? Je signe.
Sortie le 31 août.

L’ordre et la morale
De Mathieu Kassovitz, avec Mathieu Kassovitz, Iabe Lapacas, Sylvie Testud, Malik Zidi.
Qu’est-il arrivé au cinéaste Mathieu Kassovitz ? C’est une question que je me suis souvent posé ces dernières années. Après la promesse des années 90, Kasso réalisateur a traversé les années 2000 avec un Gothika sans intérêt et une adaptation de Babylone Babies massacrant l’œuvre de Dantec (c’est ça de travailler à Hollywood avec Vin Diesel…). Depuis des années, j’attends de retrouver le Kassovitz de La Haine, et il semble que 2011 marquera peut-être ce retour à un cinéma fort et engagé qui le caractérisait. Il s’y attache aux évènements ayant marqué la Nouvelle-Calédonie dans les années 80, lutte indépendantiste, prise d’otage et répression policière. J’y crois.
Sortie le 21 septembre.

The Artist
De Michel Hazanavicius, avec Jean Dujardin, Bérénice Béjo, John Goodman, James Cromwell.
Réaliser un film muet aujourd’hui, c’est pour le moins original, et forcément, ça attire l’attention. Lorsque ce film est porté par le duo Michel Hazanavicius / Jean Dujardin, à savoir le réalisateur et l’acteur des fameux OSS 117, les voyants sont tous allumés. Sérieusement, un film muet se déroulant dans le Hollywood des années 20 ? Une idée étrange et excitante à la fois. Ca passe ou ça casse. En attendant d’en savoir plus sur le film, et d’en voir de premières images, The Artist se pose sans conteste parmi les curiosités les plus attendues de 2011.
Sortie le 5 octobre.

Les aventures de Tintin : le secret de la licorne
De Steven Spielberg, avec Jamie Bell, Andy Serkis, Daniel Craig, Nick Frost, Simon Pegg, Toby Jones.
C’est un si vieux rêve de Spielberg. Et un si curieux désir de certains d’entre nous qu’un jour le réalisateur d’Indiana Jones rencontre enfin le héros d’Hergé… que finalement je suis prêt à dépasser le scepticisme des films tournés intégralement en motion capture pour attendre impatiemment le premier film de ce qui est annoncé comme une trilogie. Tintin, Haddock, Tournesol, Dupond et Dupont… tous ces personnages qui ont bercé notre enfance vont prendre vie sous l’œil d’un des plus grands conteurs du 7ème Art en activité. Forcément, le défi est énorme, et possiblement casse-gueule. Forcément, s’il y a bien quelqu’un capable de mener à bien un tel défi, c’est Spielberg.
Sortie le 26 octobre.

Le moine
De Dominik Moll, avec Vincent Cassel, Déborah François, Géraldine Chaplin, Sergi Lopez.
Dominik Moll n’est pas cinéaste à réaliser frénétiquement. Onze ans après Harry un ami qui vous veut du bien, six ans après Lemming, le voici de retour avec un projet des plus ambitieux et fascinants : une adaptation d’un roman gothique anglais du 18ème siècle s’attachant à un moine dans l’Espagne du 17ème, admiré par le peuple pour ses talents de prêcheur, connu pour sa vertu, qui va voir la tentation croiser son chemin. Le film se fait pour le moment des plus mystérieux, mais connaissant l’œuvre de Moll, et sachant qu’il a confié le rôle-titre du film à Vincent Cassel, nul doute que Le Moine sera des plus sombres. Un passage par Cannes en mai prochain semble des plus probables…
Sortie non datée.

The Yellow Sea
De Na Hong-Jin, avec Ha Jeong-Woo, Kim Yoon-Seok.
Il y a près de trois ans, Na Hong-Jin a débarqué avec, en guise de premier long-métrage, un polar noir de chez noir, The Chaser, conquérant au passage le public coréen, la Croisette cannoise et la critique française. A raison. Le voici de retour avec un second film pour lequel il retrouve les deux mêmes acteurs que dans son premier, les excellents Ha Jeong-Woo et Kim Yoon-Seok. Il retrouve également semble-t-il un univers sombre : un homme criblé de dettes accepte pour se sortir du pétrin de tuer quelqu’un. Mais avant qu’il ait perpétré son crime, il se rend compte qu’il a été piégé et que police et tueur se trouvent à ses trousses. Moi je veux bien tuer quelqu’un pour que The Yellow Sea sorte en salles en France.
Sortie non datée, bien sûr.

Take Shelter
De Jeff Nichols, avec Michael Shannon, Jessica Chastain, Sheah Whigham.
J’ai dit onze ? A quoi bon s’en tenir à onze quand un douzième film me démange tout autant que les onze autres ? Je sais bien qu’il est loin d’être sûr que celui-ci sorte en salles en France dans l’année, étant donné qu’il n’a même pas encore de date de sortie aux États-Unis, mais j’ai été sage depuis le début de ce billet en choisissant des films qui étaient presque tous assurés de sortir en 2011, alors vous m’excuserez de vous tenter avec un électron libre. Cet électron libre, c’est le second film de Jeff Nichols, à qui l’on doit le splendide Shotgun Stories, sorti il y a trois ans. C’est en partie parce que son premier film m’avait ébloui que Take Shelter se trouve dans cette liste. C’est aussi parce que Nichols s’y attache à un homme construisant un abri dans son jardin, persuadé qu’il est par d’étranges cauchemars qu’une tornade géante va bientôt s’abattre sur lui et sa famille. Un tel synopsis, porté dans le rôle principal par l’intense acteur Michael Shannon (déjà protagoniste de Shotgun Stories), promet une inquiétante balade cinématographique. Et le bouche-à-oreille qui se répand depuis Sundance semble le confirmer…
Sortie non datée, peut-être même pas en 2011... mais l'espoir n'est pas interdit !
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