Qu’il me semble loin le temps où je me rendais guilleret à la projection d’un film de Christophe Honoré. C’était pourtant hier, lorsqu’il enfermait Romain Duris, Louis Garrel et Guy Marchand dans un appartement parisien, ou qu’il nous faisait découvrir les belles chansons d’Alex Beaupain dans la bouche de Ludivine Sagnier et Clotilde Hesme. C’était hier, même pas cinq ans, mais entre temps, les films se sont fait au choix trop attendu (La belle personne), trop énervant (Non ma fille tu n’iras pas danser), voire pas désirable du tout (Homme au bain). Ces quatre dernières années furent une longue descente, de la déception vers la quasi indifférence.
2011 aurait pu être l’année du sursaut avec Les Bien-Aimés. En faisant la clôture de Cannes et en alignant à son casting Catherine Deneuve, Chiara Mastroianni, Ludivine Sagnier, Louis Garrel, et même les improbables Milos Forman et Michel Delpech, le nouveau Christophe Honoré se faisait de nouveau désirable. Il était question de chansons, de Paris, d’amour(s). Pourtant là n’était pas la curiosité des Bien Aimés. La curiosité de Bien Aimés, ou son génie sur le papier, au choix, c’était la présence au générique, improbable celle-là aussi, de Paul Schneider.
Paul Schneider pour les nombreux qui ne le connaissent peut-être pas, est un acteur américain habitué des seconds rôles discrets outre-Atlantique. On l’avait encore vu au printemps dernier dans De l’eau pour les éléphants, oui oui le film avec Robert Pattinson. Le jeune homme d’aujourd’hui à qui le vieil Hal Holbrook racontait ses aventures de jeunesse sous les traits de l’acteur de Twilight, c’était lui. Le dragueur de la bande à Jesse James dans le magnifique L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, c’était lui. Le beau-frère de Ryan Gosling qui voyait une poupée gonflable débarquer chez lui dans Une fiancée pas comme les autres (photo de droite), c’était encore lui.
Paul Schneider n’est peut-être pas de ces acteurs promis à la gloire, mais il est de ceux qui se glissent si parfaitement dans leurs personnages qu’ils ne déçoivent jamais. Il est même capable, en toute discrétion de laisser passer un romantisme teinté d’amertume, comme dans Bright Star de Jane Campion et surtout, en haut de l’affiche, dans le film qui l’a révélé et dans lequel je l’avais découvert, All the real girls de David Gordon Green, à l’époque où celui-ci tissait des drames poignants (non que je déprécie par là son revival humoristique).
La présence au générique des Bien-aimés de Paul Schneider a été mon moteur pour me diriger vers Le Cinéma du Panthéon alors que le film était en fin de parcours après une carrière un peu décevante. Ce ne pouvait être qu’une flagrante preuve de goût de la part de Christophe Honoré, après toutes ces déconvenues mentionnées plus haut. Aller chercher cet acteur américain-là n’est pas un choix anodin. Dans le film, il campe Henderson, le batteur exilé à Londres qui fait battre le cœur de Chiara Mastroianni. Mais la présence de Schneider n’a pas suffi à faire naître l’étincelle que je ne trouve plus dans le cinéma d’Honoré. L’ennui m’a vite gagné devant cette épopée romantique et chantée traversant les décennies et les grands évènements pour raconter l’histoire de ses protagonistes.
L’ambition est grande, mais le résultat peu emballant. La grande histoire est amenée trop facilement dans la petite, les numéros musicaux accrochent peu l’oreille, la narration est désespérément linéaire, et Catherine Deneuve est toujours aussi engoncée et coincée, n’en déplaise aux « couilles » et autres mots salaces que les scénarios peuvent lui faire prononcer. Finalement, c’est dans son dernier acte qu’Honoré parvient à éveiller l’intérêt, mais l’on se rend vite compte qu’il ne s’agit là en fait qu’une redite des Chansons d’amour (à l’image de l’affiche du film…), avec la mort inattendue, le deuil, l’absence, et les chansons pour tourner la page. L’émotion affleure, mais une émotion trop facile de la part du réalisateur.
Christophe Honoré m’a berné avec Paul Schneider. En fin de compte, je me suis laissé trop facilement distraire par cette voisine dans la salle du Cinéma du Panthéon qui changeait de place en cours de projection, et par ce ticket de métro qui trainait dans ma poche et avec lequel je jouais. Tout pour ne pas trouver le temps long. Tout pour ne pas constater que Christophe Honoré ne parvient pas à sortir de sa zone de confort.
6 commentaires:
Ouh toi, tu aurais du préféré aller voir True Legend de Yuen Woo-ping ! ^^ Un film expérimental sur les troubles psychologiques d'un artiste martial. ;)
Quant à Catherine Deneuve, je pose la question : est-elle encore une actrice ?
Le Yuen Woo Ping est sur mes tablettes ID, je te rassure ;) Même s'il n'est qu'à l'Orient Express... Je l'aurais bien vu au Publicis pourtant !
Catherine Deneuve est Catherine Deneuve. Moi je trouve ça un peu léger mais y a pas mal de monde pour qui ça suffit apparemment... ;)
oh non... quel dommage ta déception !
moi j'avoue toujours être fan d'honoré et n'être jamais déçu... et toujours surpris !
Moi ce qui me surprend chez Honoré c'est son incapacité à se renouveler avec ce film... =(
Et même "Non ma fille tu n'iras pas dansé" ? Ralala, celui-là, je l'ai profondément détesté...
T'as encore des tickets de metro ?!
Sinon pour parler du film, c'était le deuxieme christophe Honoré que je voyais (aprés "Non ma fille") et franchement j'ai bien accroché, j'aime beaucoup Chiara Mastroiani je pense que ça joue.
Même si le scenario est pas folichon folichon, j'aime bien le traitement de la solitude de Louis Garrel (une vraie bonne tête à claque)
La preuve en est qu'aprés ce film j'ai regardé "Les chansons d'amour" et "la belle personne".
Je crois que j'aime bien Christophe honoré
Des films de lui que tu me conseillerais ? (à part ces 3 là)co
Oui Arthur, en août je marchais aux tickets de métro because avec les vacances, ça valait pas le coup de prendre la recharge du mois du navigo si tu veux tout savoir ;)
Pour ce qui est d'Honoré, je l'aimais bien à l'époque de "Dans Paris" et "Les Chansons d'Amour", c'est en fait à peu près tout je me rends compte. Donc évidemment je te recommande "Dans Paris", même s'il faut s'accrocher pendant un premier quart d'heure hermétique et étouffant...
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