Alors voilà, c’était cela, le fameux A Serbian Film. C’était cela le film dont je regrettais presque (je dis bien presque) ces derniers jours d’avoir acheté une place pour sa projection (disons exceptionnelle) lors de L’Étrange Festival. Je m’étais décidé à y aller parce que j’avais lu ici ou là qu’il s’agissait du film électrochoc de l’année. Surtout choc. Et ma curiosité, cette belle et parfois traitresse curiosité cinématographique qui est la mienne, m’avait donc poussé une semaine avant la projection de A Serbian Film à aller acheter une place au Forum des Images.
En fait d’une place, j’en ai pris quatre, entraînant dans mon sillage trois autres curieux. Le Forum des Images et son équipe avait été bien briefé sur le caractère sulfureux du film. Dans le hall, des affichettes dans tous les coins, alertant les spectateurs potentiels sur A Serbian Film : « Attention », « Choquant », « Scènes à caractère violent », « Strictement interdit aux moins de 18 ans », quelques préventions du genre. Et pour ceux qui n’auraient pas aperçu ces mots, les employés aux caisses avaient eux aussi un petit speech préparé : « Vous savez que c’est un film dur hein ? On nous a bien dit de prévenir. C’est interdit aux moins de 18 ans il paraît que c’est super choquant, à un autre festival y a des gens qui ont fait des malaises devant le film ».
A force d’insister, j’ai fini par douter. J’ai quand même pris les places bien sûr, mais en rentrant chez moi, je suis allé jeter un œil à la bande-annonce sur Internet et survolé quelques échos. Et là, j’ai eu un sacré mouvement de recul. Du glauque, du glauque, du glauque. Du snuff movie, des hangars est-européens, des viols, de la torture… « NOOOOOOOOON, j’ai pas envie d’aller voir ça !!! Mais pourquoi ai-je attendu d’acheter ma place pour regarder des images du film !! Pffffffff… ». Voilà en gros ma réaction à la bande annonce. Toute la semaine précédant la projection, la méfiance ne m’a pas quitté.
Et vendredi, l’heure de A Serbian Film a sonné, et le verdict est tombé : mouais. Ce grand terme scientifique pour exprimer ses sentiments et son ressenti. Mouais. On suit donc un ancien acteur de films pornos, désormais marié et père d’un petit garçon, qui accepte de signer un contrat auprès d’un producteur mystérieux, qui lui promet un film porno transcendant le genre, mais dont il ne doit pas connaître le scénario. Ce qui intéresse notre héros, c’est uniquement le nombre de zéros sur le chèque, qui lui permettra de vivre à l’abri du besoin pour plusieurs décennies. Mais il ne sait pas dans quoi il s’embarque.
Ce dans quoi il s’embarque, sans grande surprise pour qui a entendu parler du film, c’est un snuff movie, un film dans lequel on viole et on tue réellement. Si un tel sujet avait à la base peu de chances de me séduire (il faut bien reconnaître que ce n’est pas un sujet « séduisant »), le traitement choisi par le réalisateur n’arrange rien. Une fois le héros lancé dans le snuff movie, alors que jusqu’ici la tension montait, tout à coup le récit, le suspense et l’intensité dramatique retombent en même temps lorsque la structure narrative se contente d’un flash forward « Trois jours plus tard », à la suite duquel nous verrons les évènements écoulés entre temps en plusieurs flashbacks. Dès lors, toute la dangerosité que l’on sentait poindre dans la première partie du film ne se fait plus jamais vraiment sentir. Elle n’est plus, et toute la place est désormais occupée par le sensationnalisme, le glauque (encore), et une violence que je ne peux m’empêcher de trouver gratuite.
Le scénariste, présent à la projection pour une séance de questions/réponses avec le public à l’issu du film, avait beau justifier le ton l’extrême violence physique de ce film en parlant d’une métaphore de la jeunesse serbe et de l’héritage du conflit yougoslave, difficile de vraiment en être convaincu devant un viol de bébé, des viols incestueux, et de la nécrophilie abjecte. J’ai d’ailleurs un peu de mal à interpréter les applaudissements de la salle (archi bondée, des spectateurs étaient même assis dans les escaliers) devant certaines de ces séquences abominables. Sürement pas de la satisfaction en tout cas (j'espère ?).
Alors voilà, c’était cela, le fameux A Serbian Film. C’était un film à voir, peut-être. Un film choc, sûrement. Un film toc, aussi.
2 commentaires:
Une critique qui atteint parfaitement son but: donner envie de ne pas voir le film!
Gagné ;)
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