lundi 22 décembre 2008

Le Bon, la Brute, le Cinglé : quand le cinéma devient communion jubilatoire

Régulièrement il est des films dont on compte les mois, les semaines, les jours voire les heures qui nous séparent de leur découverte. Les Deux Tours, Loin du Paradis ou Le Nouveau Monde ont été de tels films pour moi par le passé. Le Bon, le Brute, le Cinglé également.

The Foul King, Deux Sœurs et A Bittersweet Life, les trois précédents films de Kim Jee-Woon, ayant participé à élever le cinéma coréen au rayonnement qu’il exerce aujourd’hui, il ne faisait pas l’ombre d’un doute que le nouveau film du cinéaste serait un des évènements de 2008, d’autant plus après la rumeur élogieuse née suite à la projection hors compétition du film à Cannes en mai dernier.

Qu’ils m’ont semblé longs ces mois qui ont suivi la présentation du film sur la croisette… Entre temps, le plus important budget de l’histoire du cinéma local (17 millions de dollars, ce qui même selon les standards français n’est pas pharaonique) est devenu le plus gros succès de l’année au box-office coréen. Un tel succès, un tel buzz, semblaient m’envoyer droit vers la déception…

Ayant promis à mon vieil ami Ilyess qu’on verrait le film ensemble, j’ai patiemment attendu le 5ème jour d’exploitation, le dimanche, à la dernière séance (22h), aux Halles, pour enfin découvrir le fameux « western kimchi ».

Par où commencer pour relater les émotions procurées par une telle œuvre ? En premier lieu par l’assurance que non, la déception n’a pas été au rendez-vous. Loin de là. Au lieu de ça, j'ai assisté à l’un des films les plus jubilatoires qui soit. Une aventure délestée de toute « normalité », de toute concession, de tout flottement.

Posons l’intrigue pour ceux qui ne la connaîtraient pas : dans la Mandchourie des années 30, une mystérieuse carte (au trésor ?) fait l’objet de toutes les convoitises. Chang-Yi (la brute), un tueur à gages cruel, est engagé par un haut dignitaire pour s’en emparer. Do-Won (le bon), chasseur de primes, court après Chang-Yi et jetterait bien un œil sur la carte lui aussi. Mais c’est Tae-Goo (le cinglé), voleur de grand chemin, qui met la main dessus le premier, par hasard. Et se retrouve du même coup avec les deux autres à ses trousses, plus des brigands chinois, des gangsters coréens et des militaires japonais, par dizaines.

Le Bon, la Brute, le Cinglé est donc une course poursuite géante en plein désert Mandchou. A un rythme ébouriffant, Kim-Jee Woon nous entraîne dans une entreprise cinématographique d’une virtuosité hallucinante. C’est un spectacle de tous les instants auquel le cinéaste nous convie, où les morceaux de bravoure s’enchaînent (attaque d’un train, fusillade au marché, cavalcade à un contre cent dans le désert…), nous laissant pantois.

On pourrait craindre l’overdose, il n’en est rien. Il ne s’agit pas d’un simple exercice de style. Le récit est prenant, les moments de repos en sont à peine puisqu’ils sont l’occasion de séquences apaisées mais souvent drolatiques, et les personnages existent bel et bien à l’écran.

Avec un titre pareil, il est logique de s’attendre à un hommage et une filiation directe avec Le Bon, la Brute et le Truand de Sergio Leone. Ce n’est pourtant pour ainsi dire pas le cas. Hormis le triangle central, et l’affrontement qu’il implique et apporte, l’intrigue, le style narratif et les personnages se démarquent nettement du chef-d’œuvre de Leone.

Jung Woo-Sung pose son charisme de « bon » en plein écran, effacé mais d’une dextérité jouissive ; Lee Byung-Hun fait de sa brute un mafieux stylé et glaçant ; Song Kang-Ho s’approprie quant à lui véritablement le film. Il hérite du personnage le plus excentrique, le plus surprenant, le plus hilarant. Grâce à lui, on rit presque autant que si le film était une comédie produite par Apatow (sans rire).

Cet avis, c’est bien sûr le mien, mais je suis prêt à parier que c’est également celui de 90% des spectateurs ayant eu la bonne idée d’aller voir le film. En cette séance de 22h, dimanche soir dans la salle 3 des Halles, les 200 spectateurs que nous étions nous sommes trouvés dans un véritable état de communion devant l’énergie, la virtuosité et la loufoquerie de ce drôle de western coréen. Les rires, les sursauts, les exclamations, et même – plus rare – les applaudissements ont émaillé la projection.

Après une critique quasi unanime (aaah Libé…), le bouche-à-oreille public est assuré d’être dithyrambique. Et il n’y a rien de plus mérité.

Ces derniers mois, le cinéma de genre coréen s’était fait assez discret dans les salles françaises, en vérité invisible depuis le choc The Host voilà deux ans. Le Bon, la Brute, le Cinglé va remettre les pendules à l’heure, avant The Chaser en mars prochain.


2 commentaires:

Michael a dit…

J'ai hâte !!! Si seulement j'avais pas été malade ce WE !!! Saloperie de rhume !

David Tredler a dit…

Si j'avais pas tant de films à voir, j'y retournerais bien !!! Mmm... Je vais peut-être me laisser tenter s'il tient l'affiche un peu... =D

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