jeudi 26 avril 2012

Le cinéma d'horreur pakistanais, vous connaissez ?


Il est des lieux que le cerveau a du mal à associer avec certaines notions. Comme… la chaleur en Antarctique, ou la joie de vivre en Corée du Nord. On ne peut pas dire que ce soit des rapprochements qui se font automatiquement, et même s’il est facilement possible de les accoler, ça n’en fait pas forcément des vérités. Au cinéma aussi il y a des rapprochements qui ne sont pas évidents sur le papier, mais qui eux pour le coup deviennent des réalités indiscutables une fois qu’ils sont à l’écran, aussi farfelus soient-ils.

Mais qu’est-ce qu’il raconte celui-là ?! Ne mentez pas, j’en ai clairement entendu un marmonner cela devant son ordinateur. Ces jours-ci, le Forum des Images programme un cycle de films sur la forêt, et au sein de ce cycle les équipes du Forum se sont associés à 1kult pour mettre au point une semaine spéciale sur les films qui font peur prenant pour cadre la forêt. Un beau programme quand on sait que les bois sont un cadre qui sied particulièrement à l’horreur, et cela se retrouve dans les films programmés dans le cadre de cette semaine, allant de Mario Bava au Projet Blair Witch en passant par Evil Dead. Le Forum des Images accueillant tous les ans L’Étrange Festival, il est facile d’miaginer qu’une ou deux curiosités bien sympas puissent se cacher dans la programmation.

That’s a bingo, selon les mots de Hans Landa. Car en ouverture de la semaine forêt flippante (terme pas le moins du monde officiel, mais tellement adéquat), on ne nous proposait rien moins qu’un film gore pakistanais, Hell’s Ground, ou en VO Zibahkhana (ça claque hein ?). Non non, vous avez bien lu, un film gore pakistanais. Pour ceux qui préfèrent une dénomination plus scientifique, disons que c’est un mix entre le slasher et le film de zombies. Tout droit venu du Pakistan, donc. Je ne sais pas quel est le degré de votre curiosité au cinéma, mais chez moi il est plus aiguisé que les talons de Paris Hilton, alors quand je lis dans le programme du Forum des Images : « Le premier film gore Pakistanais », un inédit datant de 2008, mes antennes cinéphiles se dressent et mes jambes me mettent rapidement dans la direction des festivités.

Direction donc le Forum des Images, où les cinéphiles amateurs d’étrange s’étaient réunis en nombre, des têtes régulièrement croisées à la Cinémathèque, au Forum bien sûr, mais aussi à Panic Cinéma !, comme ce Phil Siné qui comme moi n’aurait raté Hell’s Ground, slasher zombie pakistanais, pour rien au monde. La bonne idée de la programmation, c’est de ne pas s’être contenté de cette folie asiatique, et d’y avoir adjoint en préambule deux courts-métrages indéniablement jouissifs. Le premier, canadien, « The legend of Beaver Dam », montre de jeunes scouts se faire attaquer par un dégénéré psychopathe lors d’une nuit autour d’un feu de camp en forêt. Le second, apparemment portugais, et magnifiquement titré « Banana Motherfucker », relate une attaque de bananes tueuses dans la jungle sud-américaine où s’aventure une équipe de tournage. Ces deux courts délicieux furent une mise en bouche joyeuse à la star de la soirée, Hell’s Ground.

En nous présentant le film, Guillaume Perrin d’1kult nous a dit une chose avec laquelle je ne suis pas le moins du monde d’accord : que Zibah Khana n’était pas un nanar, qu’il n’y avait pas une once de cynisme, que c’était premier degré et qu’il fallait en profiter et ne pas hésiter à se marrer. Si j’ai été tout à fait d’accord pour en profiter et rire un bon coup, je me pose en porte-à-faux pour ériger le film en monument du nanar qu’il est. De deux choses l’une, soit le film est effectivement sincère de la première à la dernière image, sans cynisme aucun, et alors c’est un nanar pur et dur, soit le réalisateur pakistanais manie avec dextérité le second degré et nous a concocté une parodie assumée souvent réjouissante. Peut-être y a-t-il un peu des deux à la fois, mais une chose est sûre, la gaudriole était de mise devant Hell’s ground, ou la virée de deux filles et trois garçons de la jeunesse d’Islamabad qui filent en douce à un concert de rock, et pour cela empruntent une petite route campagnarde maudite où les disparitions sont légions.

Là où le film fait fort, c’est qu’il se permet de jouer sur deux tableaux de l’horreur, le slasher, avec ce tueur sanguinaire sur lequel vont tomber les jeunes et qui va rivaliser de folie pour tenter de la massacrer, et le film de zombie, donc une incursion plus politique/écolo dans le récit (la condition des zombies n’est-elle pas la faute d’hommes et de femmes de pouvoir qui n’ont pas fait ce qu’il fallait ?). Car dans cette même région où sévit le tueur, une rivière polluée contamine les habitants et les transforme en zombies. Et bien sûr, nos pauvres amis de la ville vont tomber sur eux aussi.

Maintenant attention, si vous êtes des puristes du film d’horreur sérieux et flippant, si vous n’êtes pas adeptes de la curiosité et du ridicule pas forcément volontaire, passez votre chemin. Car Hell’s Ground fait bien plus rire que flipper. Il faut voir le mec choisir de descendre voir tout seul ce qui a mordu son pote qui a la jambe bien amoché. Il faut voir les filles trouver normal que leur ami qui s’est fait mordre la jambe ait le teint blafard, les cernes noires, et bave et crache un liquide vert fort peu orthodoxe. Il faut voir celui qui se fait plus de souci pour l’état du van que pour leurs vies après qu’ils ont croisé un groupe de zombies dégueulasses cherchant à les attaquer. Et il faut tout simplement voir le tueur à la burqa que sa mère considère comme une fille, et appelle comme telle.

En moins d’1h20, le spectacle de ce film rare est vite terminé. Je ne sais pas quand il me sera donné une autre occasion de voir un film gore Pakistanais, mais je suis déjà bien content d’en avoir vu un. Un feu de camp entre scouts, des bananes tueuses, des zombies pakistanais... Il y a des soirées comme ça…

15 commentaires:

Martin K a dit…

Punaise, c'est improbable, tes soirées ciné, David ! Cela dit, je kiffe bien le concept et je pense que si je pouvais, je m'en ferais une de temps en temps, des comme ça. Juste pour rigoler...

Qui sait ? Si ça se trouve, il y a une école du cinéma gore pakistanais et nous l'ignorons ! Tu es un explorateur du cinéma ! Un découvreur de mondes ! Un jour, peut-être, l'humanité reconnaissante te dira merci !

Moi, je te dis: continue !

David Tredler a dit…

Et plus elles sont improbables les soirées ciné, plus je les aime Martin ! ;)

Guillaume PERRIN a dit…

Héhé David,
Je confirme qu'il n'y a pas de cynisme post-moderne à la Saw/Scream/Hostel & Co. et que le film respire l'amour que le réal. porte aux bandes zombiesques italiennes fauchées des années 70/80 et aux slasher ricains poisseux sans vouloir en faire un nanar...
Il y a de l'humour certes mais c'est d'avantage pour en faire l'unique film d'horreur pakistanais mixant touts les clichés du genre de manière honnête que de se moquer de ces clichés. Ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas s'en amuser tout comme le réal. s'est amusé à le tourner.
Il faut donc revoir ta définition du Nanar qui est involontairement mauvais et consternant qu'il en devient ringard et hilarant comme Le lac des morts-vivants qui ne tient pas la comparaison avec un Hell's Ground qui a une vraie photo et pas mal de plans/séquences bien emballées au regard du budget et des contraintes de prod. et c'est justement ces contraintes de budget/prod qui nous charme dans ce film qui en devient attachant.
En tout cas content que la soirée t'ai plu, c'est le principal... Mais sincèrement ce film n'est pas un Nanar ou alors tu n'en as pas assez vu... ce que je doute au vu de ta curiosité et ta gloutonnerie !
Je n'essaye pas de défendre le film qui n'est vraiment pas un chef d'oeuvre mais de là à le qualifier de Nanar cynique :s

David Tredler a dit…

Je n'ai jamais dit Guillaume que le film est un nanar cynique. Je dit au contraire qu'il y a soit une bonne dose de cynisme dans le film (s'amuser des clichés, c'est la définition même du cynisme !!), soit le film bascule dans le nanar si ces clichés ne sont pas l'expression d'un certain cynisme, mais il me semble étonnant de ne supposer dans ce film ni un héritage nanar, ni une part de cynisme. Mais pas les deux à la fois, j'en conviens. Mais note bien que "nanar" n'est pas un gros mot dans ma bouche, hein ? ;)
Je crois au contraire que tu as une définition trop forte et arrêtée du mot "nanar" si tu penses qu'un film doit aller jusqu'à la consternation, je ne pousse pas aussi loin que cela mon appréciation personnelle...
En tout cas oui, la soirée m'a bien emballé ! Les courts-métrages aussi étaient poilant !

Guillaume PERRIN a dit…

Pour mieux m'exprimer :
Pour moi un nanar est un film involontairement drôle de par sa médiocrité... Et ce n'est pas une définition trop forte mais la simple définition de base de Nanar (http://www.nanarland.com/glossaire-definition-69-N-comme-nanar.html) Et c'est bien ce genre de film qui est relayé sur Nanarland ;)
Non, non, ce n'est pas un gros mot ! Car comme toi, j'aime les nanar. Le problème est qu'il est facile aujourd'hui de qualifier un film de Nanar (je ne parle pas pour toi mais de manière générale), le terme s'est banalisé et est souvent utiliser à tort.
Selon moi, et je parle de manière personnelle puisque j'ai découvert Hell's Ground bien longtemps avant d'avoir la possibilité de vous le projeter, je ne trouve pas pertinent d'employer le mot Nanar pour Hell's Ground ! Mais après c'est ton point de vue il n'y a pas de souci... Depuis le temps qu'on se chamaille ;)

D'autre part, s'amuser a essayer de reproduire les codes du genre ne veut pas non plus dire qu'il y a une dose de cynisme... Ce sont les codes qui en deviennent amusant/drôle et n'ont pas le réalisateur qui fait preuve d'un cynisme vis-à-vis des codes ;)
Pareil, aujourd'hui le cynisme dans les films d'horreurs est d'avantage une manière de passer pour plus intelligent que les autres et de ne pas prendre le genre au sérieux : Tiens, je connais par coeur les codes et je vais te les détourner en me foutant de la gueule du genre et des codes...
Et nous ça commence à nous gaver cette approche même si elle a su révolutionner le genre et donner des bons films. Ce qui n'est pas le cas d'Hell's Ground qui déborde d'amour vis-à-vis du genre.
Voilà pourquoi je maintiens que le film n'est pas un nanar et que s'il est amusant, ce n'est pas du "cynisme post-moderne" (car c'était ça que j'ai dit exactement lors de ma présentation ^^)

David Tredler a dit…

Involontairement drôle de par sa médiocrité, on est bien d'accord sur la définition d'un nanar Guillaume (pas de consternation là-dedans ;)).
Je m'étonne que tu t'étonnes (haha) que l'on puisse trouver un petit côté nanar à Hell's Ground tout de même. La perception d'un nanar est on ne peut plus personnelle de toute façon comme tu le soulignes ;)
Mais comme je le disais, je ne catalogue pas Hell's Ground dans la catégorie nanar, je m'interroge sur cet aspect du film.

Y a-t-il cynisme (qui n'est absolument pas incompatible avec le fait d'être amoureux du genre), est-ce un nanar, la réponse ne peut être que subjective, et l'important, c'est bien qu'on se soit éclaté devant Hell's Ground ^_^ Que le cynisme soit post-moderne ou non ;)
Les chamailleries ne cesseront jamais, et tant mieux !!

Vincent a dit…

Rien sur The Avengers ??

David Tredler a dit…

Malgré la forte envie, pas encore vu, figure-toi !!! Mais ça viendra ;)

Phil Siné a dit…

soirée mémorable en effet ! on en redemande encore...
c'est clair que les bananes tueuses étaient pas mal non plus !

David Tredler a dit…

Les bananes tueuses étaient mémorables Phil ^_^

FredMJG a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
FredMJG a dit…

AH zut ! j'ai raté et le film et le Phil ! j'étais pourtant dans Les ruines mais il m'a fallu filer.
J'attends qu'1 kult le sortira en DVD en compagnie du Dracula paki que je reverrai bien itou.

David Tredler a dit…

Le Dracula Pakistanais semble effectivement bien sympa également Fred !

Anonyme a dit…

y'a quelques années, tracks (arte) avait fait un sujet sur le cinema d'horreur pakistanais, alors oui ce film est sans doute le premier dans le genre "gore" a l'americaine, mais pas le premier du genre horreur, je me souviens que certains extraits avaient l'air ridicule et digne de bons nanar, avec les images crades et les grosses moustaches des années 70/80, plus precisement le titre du sujet je crois c'etait "le cinema gore pachtoune" ou qque chose dans le style, :) j'ai bien essayé de trouver un de ces films a l'epoque, j'en ai pas trouvé, ce qui est dommage car ça avait l'air corsé en terme de nanardise ^^ !! alors si t'a l'occase d'en voir tu risque de te marrer !!

David Tredler a dit…

Je n'en doute pas cher anonyme, celui-ci m'avait déjà bien fait marrer !

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