La première fois que j’ai eu envie de voir Chaw, j’étais en Corée du Sud. En vacances dans la péninsule d’Extrême-Orient, l’affiche du film de Shin Jung-Won s’étalait aux quatre coins du pays, des rues de Seoul à celles de Jeonju et Pusan. Un sanglier aux yeux particulièrement bestiaux fusillait du regard les éventuels spectateurs osant le défier, alors que j’ai finalement pour ma part préféré, cet été là, aller défier le tsunami géant d’Haeundae (sorti en DVD en France l’année dernière sous le titre The Last Day) puis les pentes vertigineuses de Take Off, les deux cartons du box-office coréen en 2009 avec respectivement 11 et 8 millions de spectateurs au compteur.
Il faut dire que je n’avais pas trouvé de salle projetant Chaw avec des sous-titres anglais, contrairement aux deux films qui m’avaient finalement attiré dans leurs filets. Deux ans plus tard, voici que Chaw, contre toute attente, débarque en DVD en France, conservant au passage le titre coréen original qui désigne ce sanglier mangeur d’homme terrorisant une petite bourgade de la province coréenne. Deux flics originaires de Seoul, deux chasseurs expérimentés et une jeune écologiste rêvant de reconnaissance universitaire vont allier leurs forces pour mettre la main sur cette bête étrange qui attaque et dévore les gens du village.
Je ne mentirais pas en écrivant que j’ai pu imaginer que Chaw avait des chances d’être un bon p’tit nanar. Le film a beau avoir fait plus d’un million et demi d’entrées en salles en Corée, un film de sanglier mangeur d’hommes reste un film de sanglier mangeur d’hommes. Il n’est jamais évident de prévoir à l’avance le ton d’un film coréen, tant ceux-ci parviennent souvent à naviguer avec aisance entre le premier et le second degré, et la bonne nouvelle c’est que Chaw joue sans hésitation la carte du second degré. Le film a beau s’atteler soigneusement à son atmosphère de film fantastique tendance « je vais vous sortir un monstre qui va vous foutre les chocottes », il a bien conscience du piège que pourrait constituer un abus de sérieux, et préfère embrasser la légèreté.
Il n’y a qu’à voir les personnages, ce jeune flic se retrouvant au fin fond de la campagne pour n’avoir pas pris son formulaire d’affectation au sérieux et se trimballant sa mère avec lui, ce chasseur encadré par deux finlandais pour taquiner les bébêtes, cette folle aux allures de sorcière se prenant pour une grand-mère, ou ce flic de la ville ne quittant pas ses lunettes de soleil. La galerie de personnages est colorée et place rapidement le film sur le ton de la comédie. Bien sûr un certain Bong Joon-Ho a montré par le passé que l’on pouvait faire du très grand cinéma avec le genre « film de monstre », mais en ne visant pas autre chose que la comédie, voire la parodie, Shin Jung-Won fait de Chaw un petit trip campagnard et faussement horrifique plutôt sympa.
La vision de ce sanglier géant et affamé de chair humaine n’est pas non plus la plus grande réussite visuelle qui soit (la séquence inattendue et étrangement drôle du sanglier de Welcome to Dongmakgol vient à l’esprit), mais en fin de compte, cela contribue à voir Chaw sous l’œil de l’humour, bien servi qu’il est par le jeu forcé adéquat de toutes ces têtes familières du cinéma coréen, notamment Yoon Jae-Moon du drama Iris et l’omniprésente Jung Yu-Mi, vue ces derniers mois dans deux Hong Sang Soo (Like you know it all et Oki’s Movie) et deux films présentés au Festival Franco-Coréen du Film 2010 (le délicieux Oishi Man et l’agaçant The Room Nearby).
J’ai beau préférer la salle au DVD, pour ces films coréens - et asiatiques en général - qui n’ont que peu de chance d’être exposés sur grand écran en France, le plaisir est grand de les voir officiellement à la portée des spectateurs français, même si ce n’est que sur petit écran. Et puis dans les prochains jours, J’ai rencontré le Diable et The Murderer sortent en salles, cela compensera largement. L’été sera au moins un peu coréen !
9 commentaires:
M'a l'air pas si mal que ça tout compte fait... je vais voir si je le chope pas. Si une histoire de sanglier mangeur d'homme pouvait être fun (on imagine le nanars que tu soulignes), il pouvait aussi s'avérer très trop 1er degré, un degré qui dénature ces œuvres si elles ne sont pas bien faites. Pour le coup, c'est 2nd degré donc c'est cool.
Oui je te rassure, le film est loin de se prendre au sérieux, y a de la déconnade dans l'air !
Salut David,
Malgré tes encouragements, je crois que je vais passer mon tour, là. Sauf s'il tombe devant mes yeux, mais j'ai comme un doute.
Cela dit, ce post est intéressant quand même ET utile ! En effet, il m'a rappelé que je ne n'avais pas répondu à ton commentaire sur le dernier film coréen que j'ai regardé. C'est désormais chose faite... dans le corps du message lui-même.
Je te dis à bientôt pour d'autres lectures que j'espère toujours réciproques.
Salut Martin,
Ca remonte à quand, à quel message cette question sur le dernier film coréen ? C'était sur ton blog ? Je n'arrive pas à retrouver.
Les lectures sont toujours réciproques^^
mouaif, décidemment les sangliers monstrueux semblent peu inspirer le cinéma. Pas vu Chaw, mais je suis un peu déçu de lire qu'il prend des allures de comédie.
Message du 20 juin, David ;-)
@Alice : oui pour le coup c'est vraiment de la comédie Chaw...
@Martin : Cool ! Mais je ne savais pas qu'il y avait eu un tel coffret édité en France, avec ces films là ! J'en ai vu 4 dans le lot : CHristmas in August, Milky Way Liberation Front, Secret Sunshine et The SHow must go on. Le meilleur est sans conteste Secret Sunshine =)
certes, mais cesse de me contester, sinon ça va devenir "chaw" entre nous !
Désolé...
Y a pas de mal ^_^
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